Transferts en santé : pas d’entente entre les provinces et le fédéral

Prenant la parole pour ses homologues à l’issue de la rencontre, le ministre de la santé du Québec, Gaétan Barrette, a jugé que les discussions ne faisaient que commencer. Crédit image: Benjamin Vachet

OTTAWA – Les négociations entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires sur les transferts fédéraux en santé n’ont finalement débouché sur aucun accord, le lundi 19 décembre, à Ottawa.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

La volonté annoncée par Justin Trudeau lors de son élection d’un dialogue renouvelé avec les provinces s’est frotté à la réalité, le lundi 19 décembre. Les ministres provinciaux et territoriaux de la Santé ont unanimement rejeté la proposition du gouvernement fédéral en matière de financement fédéral des soins de santé.

La journée avait mal débuté pour le ministre des Finances, Bill Morneau, et la ministre de la Santé, Jane Philpott, chargés de négocier l’entente. Avant même le début de la rencontre, les provinces et territoires avaient dénoncé ce qu’ils jugeaient être un ultimatum de la part d’Ottawa.

Le gouvernement fédéral se disait prêt à offrir une hausse des transferts de 3,5 % pour cinq ans, contre 3 % prévue dans l’entente fédérale-provinciale conclue sous le gouvernement conservateur, accompagnée d’un investissement ciblé sur dix ans de 5 milliards de dollars pour les soins en santé mentale et de 6 milliards pour les soins de santé à domicile. Une offre jugée insuffisante par les provinces pour répondre à la croissance des besoins en matière de santé et au vieillissement de la population canadienne.

Il y a quelques jours, la première ministre de l’Ontario, Kathleen Wynne, avait milité pour une hausse annuelle des transferts fédéraux en santé de 5,2 %. Une proposition reprise par le front commun des provinces et territoires, et qui a reçu l’appui de l’Association des hôpitaux de l’Ontario.

« Nous sommes très déçus », a lancé le ministre des Finances du Canada, Bill Morneau, à la sortie des discussions. « Nous avons fait une proposition substantielle aux provinces et territoires, qu’ils ont décidée de refuser. Nous nous sommes présentés ouverts et transparents sur ce que nous pouvions faire par rapport à notre situation budgétaire et notre proposition était à même de faire une vraie différence dans la vie des Canadiens en matière de santé. »

La ministre Philpott a pour sa part défendu l’approche du gouvernement fédéral.

« Nous avions déjà eu des discussions dans l’année et l’objectif reste d’améliorer notre système de santé avec des transferts ciblés qui ont prouvé leur efficacité dans d’autres pays. Notre système actuel est excellent, mais il peut encore être amélioré », a-t-elle soutenu.

« Seulement le début des négociations »

Son point de vue n’était toutefois pas celui des ministres des provinces et territoires qui, à l’unanimité, ont fustigé l’attitude du gouvernement fédéral.

Prenant la parole pour ses homologues à l’issue de la rencontre, dans une salle de conférence du Château Laurier, à Ottawa, le ministre de la santé du Québec, Gaétan Barrette, a jugé que les discussions ne faisaient que commencer.

« Il n’y a pas eu de négociations durant la dernière année. Nous nous sommes présentés aujourd’hui à cette rencontre dans un esprit de collaboration. Il s’agit d’un enjeu complexe qui bien évidemment ne peut pas se résoudre en deux heures. Ce n’est que le début et nous sommes prêts à négocier. »

Selon les calculs des provinces et territoires, la proposition du gouvernement fédéral aurait conduit à une baisse de transferts fédéraux en santé de l’ordre de 51 milliards de dollars sur dix ans, amenuisant la part des dépenses en santé prise en charge par le gouvernement fédéral de 23,3 % à 22,2 % d’ici cinq ans, puis à 20,4 % dans dix ans.

Sousa

D’ordinaire beaucoup plus enjoué au moment d’évoquer les relations du gouvernement ontarien avec celui de M. Trudeau, le ministre des Finances de l’Ontario, Charles Sousa, n’a pas mâché ses mots.

« Nous n’avons pas eu l’opportunité de discuter! Ce n’étaient pas des négociations mais une approche unilatérale de la part du gouvernement. Ils ont mis fin à la rencontre, mais pour notre part, nous sommes toujours prêts à discuter. »

Les ministres des Finances et de la Santé des provinces et des territoires demandent la tenue d’une rencontre des premiers ministres pour négocier une entente à long terme sur le financement de la santé.

Faute d’une entente, c’est l’accord négocié à l’époque du gouvernement conservateur qui prendra finalement effet à compter du 1er avril prochain, soit une hausse des transferts d’Ottawa vers les provinces et territoires de 3 % par année en santé. En 2017-2018, le fédéral devrait ainsi reverser un montant de 14,33 milliards de dollars à l’Ontario, contre 13,9 milliards de dollars en 2016-2017.