Projet de loi 92 : des changements qui inquiètent l’AEFO

Rémi Sabourin, président de l’AEFO. Crédit image: Jean-François Morissette

TORONTO – Le projet de loi 92, qui modifie le processus de négociation de convention collective, suscite de vives inquiétudes dans le milieu éducatif de la province. Selon l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), les changements proposés risquent de carrément nuire à la représentativité linguistique de ses membres.

JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72

Récemment, la ministre de l’Éducation, Mitzie Hunter, a proposé plusieurs modifications à la loi régissant les négociations collectives dans les conseils scolaires.

On suggère entre autres de pouvoir proroger les conventions collectives avec les conseils scolaires et réunir différents groupes représentants le milieu de l’enseignement dans un processus de « négociation centrale ».

Devant le comité chargé d’étudier le projet de loi, mercredi 8 mars, le président de l’AEFO, Rémi Sabourin, a dénoncé l’intention du gouvernement d’obliger le syndicat, qui représente également le personnel de soutien, à faire partie d’organismes négociateurs provinciaux.

Selon lui, en agissant ainsi, les francophones à la table de discussion se voient inondés dans une marre de groupes anglophones et n’ont plus de réelle voix pour exprimer leur réalité linguistique.

« Tout se ferait en anglais et la réalité francophone va se perdre », s’est-il exclamé en entrevue avec #ONfr.

Rémi Sabourin a également souligné que bien que la plupart des rondes de négociations se font en français, les « vraies » décisions se prennent en anglais.

« La négociation se fait en français, mais quand il y a de grandes décisions qui sont prises (…) ce n’est pas les gens qui sont à la table qui détiennent le pouvoir décisionnel. Les vrais preneurs de décisions sont anglophones alors quand il y a de vraies décisions qui doivent être prises, on doit le faire en anglais. » – Rémi Sabourin

Pour le président de l’AEFO, il est essentiel que des francophones puissent se retrouver au centre du pouvoir décisionnel pour bien comprendre la réalité des milieux minoritaires et des membres de son syndicat. Il craint que sans une voix francophone, les points importants soulevés par son organisme soient perdus en traduction.

« Chaque mot est pesé dans une convention collective », l’a-t-il rappelé.

L’AEFO craint également que les changements proposés avec le projet de loi 92 alourdissent le processus de négociation et ajoutent davantage d’embuches à la bonne entente entre les différentes parties.

La prochaine ronde de discussions avec les conseils scolaires doit avoir lieu en 2018.

Selon la dernière convention collective, signée il y a quelques semaines, les membres de l’AEFO ont eu droit à une augmentation de 4 % sur deux ans ainsi qu’une amélioration du financement des avantages sociaux.

Une enveloppe de 10 millions de dollars pour appuyer la réussite des élèves avec des besoins particuliers a également été obtenue lors des négociations.

Les conseils scolaires inquiets

Jean-François L’Heureux, vice-président de l’Association des conseils scolaires des écoles publiques de l’Ontario (ACEPO), s’est également dit inquiet des propositions faites dans le projet de loi 92. Bien que des recommandations aient été faites par son groupe au cours des dernières semaines, certaines des propositions majeures ont été ignorées dans le projet de loi final.

M. L’Heureux a indiqué qu’il était très important que le processus de négociation soit séquencé, c’est-à-dire que la négociation centrale avec tous les groupes sur les enjeux généraux soit réglée avant que les négociations locales commencent, ce qui actuellement pas le cas projet de loi.

Dans le projet de loi 92, ajoute-t-il, les amendements proposés par le gouvernement ne traitent pas de l’imposition possible de sanctions continues et simultanées faites par les syndicats. En n’abordant pas ce point, le système se retrouve particulièrement vulnérable à un « état perpétuel de sanctions », ce qui va ,selon lui, à l’encontre de l’intérêt des élèves

Dans une récente entrevue accordée à #ONfr, la ministre de l’Éducation, Mitzie Hunter, a indiqué que les changements législatifs proposés dans le projet de loi 92 ne sont pas nécessairement définitifs et qu’il reste encore du temps avant l’adoption final du projet de loi.

Le comité étudiera les propositions faites par les différents groupes au cours des prochaines semaines et recommandera des amendements possibles au projet de loi.