L’Ontario veut serrer la vis aux services financiers « alternatifs »

Queen’s Park avait déjà adopté une première loi en 2008 pour encadrer les prêteurs sur salaire et les services d’encaissement de chèques. Google Street View

TORONTO – Le ministre des Services aux consommateurs de l’Ontario veut serrer davantage la vis aux services financiers dits « alternatifs », comme les prêteurs sur salaire. David Orazietti a dans sa mire les taux d’intérêts exorbitants et les manœuvres de recouvrement parfois déloyales de certaines de ces entreprises.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

Queen’s Park avait déjà adopté une première loi en 2008 pour encadrer les prêteurs sur salaire et les services d’encaissement de chèques. Une loi que l’industrie a toutefois vite fait de contourner avec de nouveaux produits financiers.

Les prêteurs Cash Store et Instaloans – rachetés début 2015 par Easyfinancial – ont, par exemple, cessé d’offrir des prêts sur salaire et se sont mis à offrir des marges de crédit à leurs clients qui ont besoin d’argent entre deux payes. Cette simple substitution a permis à l’entreprise de passer sous le radar de la loi depuis un peu plus de deux ans.

« Ces entreprises continuent à mettre sur le marché des produits qui font augmenter leurs profits et leurs revenus. Nous comprenons leurs intentions », a déclaré M. Orazietti à sa sortie de la Législature, mercredi 9 décembre. « Mais nos intentions à nous, évidemment, sont de créer un marché juste et équitable pour les consommateurs. »

Le nouveau projet de loi des libéraux à Queen’s Park vise aussi les services de location avec option d’achat qui, selon le ministre, ne donnent pas toujours à leurs clients un délai de grâce suffisant pour le remboursement de leurs emplettes.

Enjeu de longue date

L’enjeu ne date pas d’hier. Déjà au début des années 1990, l’ancien député libéral Gilles Morin, d’Ottawa, proposait de resserrer les règles entourant les services d’encaissement de chèques. Il dénonçait, à l’époque, que des prêteurs sur salaire réclament à leurs clients un droit de 4% à 5% pour l’encaissement d’un chèque d’aide sociale.

En 2013, la province a aussi demandé la révocation du permis d’entreprise des Cash Store et d’Instaloans, alléguant que les prêteurs contrevenaient à la loi qui limite leurs frais de service. Les deux entreprises octroyaient alors leurs prêts sur salaire sous forme de cartes de débit prépayées, facturant au passage des frais d’activation de 18$ en plus du taux d’intérêt maximal de 21$ par tranche d’emprunt de 100$.

« Le gouvernement a attendu beaucoup trop longtemps avant d’agir », a opiné le néo-démocrate Jagmeet Singh, ajoutant que les prêteurs ont eu largement le temps de trouver des échappatoires à la loi de 2008. « L’industrie des prêteurs sur salaire en général profite des gens qui sont déjà dans une position précaire et rend leur vie plus difficile encore. C’est inacceptable que le processus (d’élaboration d’une nouvelle loi) ait pris autant de temps. »

« Il y a beaucoup de gens qui vivent dans la pauvreté ou qui ont perdu leur emploi et qui cherchent une façon d’obtenir de l’argent. Ils vivent une situation difficile. Ils ont droit à un système réglementé et sécuritaire », a fait savoir à #ONfr le chef progressiste-conservateur Patrick Brown. « Mais j’ai besoin de plus de détails par rapport à cette nouvelle loi », a-t-il relancé.