Le pari du bleu Marin dans Ottawa-Vanier

André Marin, ici dans ses fonctions d'ancien ombudsman, représente les couleurs du PC de l'Ontario dans Ottawa-Vanier. Archives

[ANALYSE]

OTTAWA – André Marin aime surprendre. Il avait souvent créé la polémique dans ses fonctions d’ancien ombudsman. Il y a une semaine, le natif d’Ottawa a pris tout le monde de court en annonçant sa candidature dans Ottawa-Vanier pour le Parti progressiste-conservateur.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

Pour l’ancien « chien de garde » de l’Ontario, le défi est immense dans une circonscription provinciale acquise aux libéraux depuis 1971. En 45 ans, les progressiste-conservateurs n’ont dépassé qu’une fois la barre des 30%.

En 1977, une certaine Gisèle Lalonde, candidate pour le parti de Bill Davis, était même défaite avec quelque 17% des voix. Preuve que les francophones et la big blue machine n’ont pas toujours fait mauvais ménage à Vanier. La candidature d’André Marin le rappelle à certains égards.

Le nom de la circonscription est aussi trompeur. En plus de Vanier, le comté comprend entre autres Rockcliffe, la Côte-de-Sable et Overbrook. Une population à priori cosmopolite, progressiste, où les employés de la fonction publique y ont établi leurs résidences. Un terreau à priori peu fertile pour les idées conservatrices.

Au-delà de sa notoriété, André Marin est un symbole. En dix ans, il n’a eu de cesse de dénoncer avec intégrité et véhémence les écarts du gouvernement, tant au niveau de la brutalité policière que du manque de transparence des municipalités. M. Marin a ensuite accumulé les plaintes sur son bureau pour la vente d’Hydro one. Malgré des appels du pied, son mandat n’a finalement pas été reconduit par les libéraux.

Difficile pour le moment de parler d’un « mariage de convictions » entre Patrick Brown et André Marin. Pour le premier, il s’agit de tirer profit de l’image de défenseur de la veuve et de l’orphelin véhiculée par l’ancien ombudsman. Pour le second, nul doute qu’il y a dans cette intronisation offerte un sentiment de revanche vis-à-vis du Parti libéral avec qui la « collaboration » s’est mal terminée.

Parti de très loin, André Marin n’a pourtant rien à perdre, mais au contraire tout à gagner. En lançant ce candidat vedette, Patrick Brown adresse un message clair aux libéraux, mais aussi aux francophones : le chef du PC de l’Ontario ne négligera pas la région d’Ottawa en 2018, et prépare d’ores et déjà ses pions.

C’est peut-être ici le problème de cette candidature vedette. À Ottawa-Vanier, le nom d’André Marin – résident de Nepean – ne résonne pas particulièrement. Et les dix années qu’il a passées à Toronto à titre d’ombudsman ne l’ont pas aidé à créer un lien tangible avec les résidents d’Ottawa-Vanier qu’il veut représenter.

S’il veut faire ses preuves dans son nouveau parti, André Marin a aussi un adversaire à combattre : lui-même. Ses derniers mois à titre d’ombudsman l’ont souvent vu déraper sur son compte Twitter. On se souvient de son gazouillis « Le maire de Casselman toujours en crisse (sic). Relax chum » à l’égard de Conrad Lamadeleine. Deux jours avant son investiture, M. Marin comparait le nouvel ombudsman, Paul Dubé, à Marie-Antoinette. Récidiviste.

On ne pardonne pas les phrases de trop dans les partis politiques. C’est d’autant plus vrai chez les progressistes-conservateurs à Queen’s Park, écartelés entre plusieurs mouvances politiques, et dont les messages des élus sont passés au peigne fin. En avril dernier, le député du parti, Jack MacLaren, a été dépouillé de toutes ses responsabilités parlementaires après des propos misogynes.

Même s’il perd cette élection qui aura lieu probablement dans quelques semaines, André Marin a l’occasion de réussir son « test politique ». Il y a en lui la possibilité d’un futur ministre déléguée aux Affaires francophones. Dans les circonstances d’une victoire de Patrick Brown en 2018, ce ne serait cette fois-ci pas une surprise.

Cette analyse est aussi publiée dans le journal LeDroit du 1er octobre