Le NPD au pouvoir en C.-B. : une « occasion » pour les francophones

Le nouveau premier ministre de la Colombie-Britannique, John Horgan, et ses partisans. Crédit photo: Facebook John Horgan

VICTORIA – Les 70 000 Franco-Colombiens attendent beaucoup du nouveau gouvernement provincial. Pour la première fois depuis 16 ans, ils devront maintenant s’adresser au Nouveau Parti démocratique (NPD) pour toute revendication, après le « départ » des libéraux de Christy Clark.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

La semaine dernière, la décision de la lieutenante-gouverneure, Judith Guichon, d’inviter le chef néo-démocrate, John Horgan, et son allié de circonstance, le Parti vert à former le gouvernement a donc mis fin à un feuilleton politique de plusieurs semaines. Lors des élections du 9 mai dernier, le Parti libéral de la Colombie-Britannique n’avait raflé que 43 des 87 sièges… devenant dès lors un gouvernement minoritaire, menacé par une éventuelle coalition du NPD et du Parti vert.

De quoi souffler un vent d’espoir pour les francophones? « C’est l’occasion de formuler des demandes. Une porte est ouverte », résume le politologue Rémi Léger, de l’Université Simon Fraser, à Vancouver.

D’autant que l’annonce de la mise en place d’une politique sur les services en français pour la « province voisine » de l’Alberta pourrait donner des ailes aux militants. La province du Pacifique reste la seule à ne pas bénéficier d’une telle garantie.

« Nous souhaitons bien une politique », soutient la présidente de la Fédération des francophones de Colombie-Britannique (FFCB), Padminee Chundunsing. « Il est important que les nouveaux arrivants se sentent comme chez eux, et bénéficient des services en français dans les centres d’emplois. »

L’organisme porte-parole des Franco-Colombiens entend bien mener prochainement un sondage auprès « des francophones et francophiles » pour évaluer les besoins en matière de services en français.

Mais Rémi Léger se montre plutôt sombre sur la réceptivité du NPD à d’éventuelles demandes, dans les prochains mois. « Aucun des partis provinciaux ne s’est prononcé sur la question du français durant la campagne, pas même le NPD de John Horgan. »

Un fait confirmé par Mme Chundunsing : « Que ce soit les libéraux, ou les autres partis, personne n’a voulu nous rencontrer durant la campagne électorale. Nous espérons maintenant avoir des rencontres beaucoup plus régulières avec les élus du nouveau gouvernement. Il faut absolument les sensibiliser aux enjeux communautaires et francophones. »

Une identité néo-démocrate différente

Reste que tous les NPD ne se ressemblent pas. Peter Graefe, professeur de science politique à l’Université McMaster, est formel : « À la différence de l’Ontario, le NPD de la Colombie-Britannique est depuis 16 ans le premier parti d’opposition. En conséquence, il a dû ratisser beaucoup plus large, avec des choix réalistes, pour montrer qu’il est apte à gouverner. C’est important pour lui de se présenter comme un parti peu dangereux. »

Pour le politologue, « la tension aigue » de ce NPD provincial, c’est qu’il doit obligatoirement adopter des positions plus écologistes. « Le NPD de l’Alberta est par exemple beaucoup plus tourné vers les intérêts économiques que le NPD de la Colombie-Britannique. »

Pour M. Léger, les 41 députés du NPD britanno-colombien auront probablement un ancrage plus social que le parti homologue de l’Alberta, au pouvoir à l’Assemblée législative d’Edmonton depuis 2015. « En Colombie-Britannique, le parti est plus axé sur les programmes sociaux, tandis qu’en Alberta, le parti doit se réconcilier avec l’industrie du pétrole. »

Doutes sur les capacités du gouvernement à tenir

La coalition NPD-Parti vert, qui sera un gouvernement minoritaire, est somme toute jugée fragile par de nombreux observateurs. « Je ne pense pas que ça va durer quatre ans », avance M. Graefe. « Les deux partis ont quand même intérêt à faire tenir le gouvernement le plus longtemps possible  pour permettre la réforme du mode de scrutin, celle du financement politique ou encore la reconnaissance du Parti vert comme parti politique officiel à l’Assemblée législative. »

Les conditions économiques sont en tout cas favorables, estime M. Léger. « Le Parti libéral a fait une bonne gestion financière. Un surplus est même prévu. Le NPD va donc pouvoir puiser dans ce surplus. »