Les cinq dossiers à surveiller en 2018 pour les langues officielles

Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau. Crédit image: Benjamin Vachet

Après plus de deux ans au pouvoir et malgré quelques mesures, le gouvernement libéral de Justin Trudeau sera très attendu en 2018, tant au niveau du dévoilement du nouveau plan d’action pour les langues officielles, qu’au niveau du leadership du premier ministre.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Plan d’action sur les langues officielles

C’est le dossier à surveiller en cette année 2018. Les organismes francophones de l’extérieur du Québec ont tiré sans relâche sur la sonnette d’alarme depuis l’élection de Justin Trudeau, voyant une lueur d’espoir dans l’ascension du Parti libéral du Canada (PLC) à la Chambre des communes.

Plusieurs d’entre eux sont menacés de disparition, à l’image du Réseau pour le développement de l’alphabétisme et des compétences (RESDAC). Selon les organismes, la précarité de leur situation s’explique par le gel du financement fédéral depuis une décennie.

Pour combler ce retard, ils réclament depuis 2015 une indexation de leur enveloppe de financement dans le budget fédéral, en attendant le nouveau Plan d’action pour les langues officielles.

La ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly. Crédit image : Archives #ONfr

Une demande restée sans succès, la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, sollicitant leur patience avant le dévoilement des détails de leur plan au printemps 2018.

La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada chiffre ses attentes minimales à 575 millions de dollars supplémentaires, qui s’ajouteraient à l’enveloppe de 1,1 milliard de dollars de la précédente Feuille de route pour les langues officielles.

Médias francophones et politique culturelle

Les appels à l’aide se sont également accumulés au cours de l’année 2017 pour que le gouvernement trouve un moyen d’aider les médias canadiens. Pour les médias francophones en contexte minoritaire, la situation est d’autant plus intenable que leur marché spécifique limite leurs possibilités de revenus et que plusieurs sont menacés.

L’Association de la presse francophone (APF), l’Alliance des radios communautaires du Canada (ARCC) et le Quebec Community Newspapers Association (QCNA) font front commun dans le dossier pour assurer l’avenir de leurs membres.

En 2016, ils ont fait plusieurs demandes, dont un fonds d’urgence pour pallier aux pertes de publicités du fédéral depuis 10 ans, un fonds de développement pour les médias communautaires en situation minoritaire et un crédit d’impôt pour les entreprises qui achètent de la publicité dans les médias.

Malgré l’appui du comité permanent du patrimoine canadien, le gouvernement n’a pas encore répondu à leurs demandes et la politique culturelle présentée par la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, en septembre dernier, n’a pas levé les inquiétudes.

Commissaire aux langues officielles du Canada

Après une année mouvementée, le Commissariat aux langues officielles (CLO) du Canada sera scruté de près.

Son nouveau chef, Raymond Théberge, devra tourner la page du feuilleton de la nomination avortée de Madeleine Meilleur et faire connaître sa vision.

Les comparutions de M. Théberge devant le Sénat et le comité permanent des langues officielles en décembre ont soulevé quelques inquiétudes.

Le nouveau commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge. Crédit image : Université de Moncton

Dans un style forcément différent de celui de M. Fraser, il devra démontrer sa capacité à promouvoir et faire progresser les langues officielles, notamment au sein de la fonction publique fédérale.

La forte hausse des plaintes et l’étude, débutée sous la gouverne de la commissaire intérimaire Ghislaine Saikaley, sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles, dont le 50e anniversaire est prévu en 2019, devrait faire partie de ses priorités.

Nouveaux sénateurs

En décembre, le premier ministre Justin Trudeau a annoncé la nomination au Sénat de Mary Coyle, de la Nouvelle-Écosse, et de Mary Jane McCallum, du Manitoba.

Mais encore 11 nominations sont attendues, dont une pour l’Île-du-Prince-Édouard, la Saskatchewan, Terre-Neuve-et-Labrador, les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon, deux pour la Nouvelle-Écosse et quatre pour l’Ontario.

Après la vague des nominations de 2016, dont celles de la Franco-Manitobaine, Raymonde Gagné, de l’Acadien, René Cormier et de la Franco-Ontarienne, Lucie Moncion, les communautés francophones de l’extérieur du Québec espèrent plus de représentants, notamment en Ontario.

L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) a d’ailleurs rappelé à plusieurs reprises que le Sénat compte traditionnellement au moins deux représentants franco-ontariens, contre la seule Mme Moncion actuellement.

Le leadership de Justin Trudeau

Quelle place le premier ministre Justin Trudeau accorde-t-il aux langues officielles, à la dualité linguistique et au bilinguisme au Canada?

La question a été posée à plusieurs reprises par les porte-paroles en matière de langues officielles des partis d’opposition, mais aussi par les spécialistes du dossier. La controverse entourant la réponse de M. Trudeau en anglais à une question qui lui avait été posée en français, en Ontario, a nourri bien des interrogations et les organismes attendent un signe.

Depuis le feuilleton du CLO, au printemps dernier, la FCFA demande une rencontre au premier ministre, sans succès jusqu’ici. Son nouveau président, Jean Johnson, souhaite « que le premier ministre Justin Trudeau fasse une déclaration publique dans laquelle il s’engage envers les communautés de langue officielle en situation minoritaire et au respect de la Loi sur les langues officielles », confiait-il à #ONfr, en septembre.

Reste à voir si M. Trudeau entendra sa demande et contredira celles et ceux qui doutent de sa sensibilité à la question des langues officielles.