La sénatrice Maria Chaput démissionne

La sénatrice Maria Chaput. Gracieuseté

OTTAWA – Les francophones hors Québec devront se passer de l’une de leurs principales représentantes politiques. La sénatrice Maria Chaput a annoncé sa démission, mardi 2 février, pour des raisons de santé.

SÉBASTIEN PIERROZ
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BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Ce départ sera effectif à partir du 1er mars. Âgée de 73 ans, Mme Chaput quitte donc la vie politique deux ans avant la retraite imposée à la Chambre haute.

« Ce fut un honneur et un privilège de siéger au Sénat du Canada et de représenter le Manitoba, plus particulièrement les communautés de langue officielle en situation minoritaire », a déclaré, dans une lettre, la sénatrice.

Jointe par #ONfr, Mme Chaput précise les raisons de son départ.

« Cela fait plus d’un an et demi que je n’ai plus l’énergie nécessaire pour bien faire mon travail, mais je ne voulais pas quitter mon poste avant les élections pour ne pas donner mon siège à M. Harper. De plus, il y avait plusieurs petites choses que je voulais terminer avant de partir. J’ai des problèmes de santé, une déficience rénale, et le stress n’aide pas ma situation. Aujourd’hui, j’ai besoin de me reposer, de prendre du temps pour moi et pour ma famille. »

Nommée par le premier ministre libéral Jean Chrétien en 2002, Maria Chaput s’est distinguée comme la première femme Franco-Manitobaine à siéger au Sénat.

« Pendant toute ma carrière de sénatrice, j’ai travaillé à sensibiliser les sénateurs et le public à la réalité des francophones hors Québec. Je me suis battue pour faire une différence, faire avancer les droits des minorités de langues officielles et rappeler au gouvernement fédéral ses obligations. Les dernières années ont été très dures. Pendant quatre ans, nous n’avons pas avancé. Mes collègues conservateurs ont oublié la raison d’être du Sénat et cédé à une partisannerie aveugle. Je suis très fière de ce que j’ai accompli, mais très déçue que, malgré l’unanimité des témoignages en faveur de mon projet de modifier la Loi sur les langues officielles, les conservateurs l’aient bloqué. »

La parlementaire a déposé à trois reprises un projet de loi visant à moderniser la Partie IV de la Loi sur les langues officielles. Sa dernière tentative est morte au feuilleton au début de l’été 2015 du fait du déclenchement des élections fédérales.

 

Le Sénat, un outil indispensable

Souvent critiqué ces dernières années, le Sénat n’en demeure pas moins essentiel, selon la sénatrice.

« C’est un mythe de penser que les gens qui siègent au Sénat ne travaillent pas! Le Sénat est un outil essentiel pour les communautés de langues officielles en situation minoritaire. Les sénateurs ne doivent pas oublier sa raison d’être qui est de protéger les minorités les plus vulnérables. Ils doivent garder leur indépendance d’esprit et penser au bien-être du Canada et non suivre la ligne de parti. »

La présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA), Sylviane Lanthier, a rendu hommage au travail de Mme Chaput, par voie de communiqué.

« Le défunt sénateur Jean-Robert Gauthier voulait faire de la Loi sur les langues officielles un chien de garde au lieu d’un chien de poche. Au cours des dernières années, la sénatrice Chaput a, dans une large mesure, repris ce flambeau en travaillant d’arrache-pied pour moderniser la partie IV de la Loi, celle qui détermine où les institutions fédérales doivent offrir des services et des communications en français et en anglais. Je tiens à la remercier chaleureusement pour tout ce qu’elle a fait pour la francophonie et pour le Canada. »

 

Perte pour la francophonie hors Québec

Alors que l’Ontario ne compte plus aucun sénateur francophone depuis le retrait de Marie Charrette-Poulin, et la disparition de Jean-Robert Gauthier, les francophones hors Québec perdent une autre de leurs représentantes.

« Mais nul n’est irremplaçable! », lance Mme Chaput. « Je pense qu’il est important d’avoir de nouvelles personnes, avec de nouvelles idées. J’encourage toutes les Canadiennes et tous les Canadiens à postuler pour s’assurer que les minorités soient bien représentées au Sénat. »

La présidente de la Société franco-manitobaine (SFM), Jacqueline Blay, rend un hommage appuyé au travail de Mme Chaput, sans toutefois se montrer pas inquiète.

« Je comprends la décision de Mme Chaput. Elle a travaillé très fort pendant plusieurs années, dans des conditions difficiles, et aujourd’hui, elle doit penser à elle-même. Elle a été une championne de la francophonie manitobaine et canadienne hors Québec grâce à son travail acharné, son excellente connaissance des dossiers et son incroyable probité. Ce sera difficile de la remplacer mais je suis confiante. Ce que nous souhaitons, c’est que la personne qui prendra sa place fasse preuve du même attachement à défendre les valeurs et les objectifs des Franco-Manitobains et comprenne l’importance de promouvoir le bilinguisme et les droits des minorités. »

La présidente de la FCFA en profite pour lancer un message alors que cinq nouvelles nominations sont attendues très prochainement.

« Maria Chaput a montré comment les parlementaires peuvent travailler dans le meilleur intérêt des francophones, de façon rassembleuse. Et au moment où s’enclenche le processus de sélection de nouveaux sénateurs et de nouvelles sénatrices, son legs montre clairement pourquoi il est important que des francophones de nos communautés soient nommés à la Chambre haute. »