Grève dans les collèges : « le gouvernement a un mot à dire », estime le syndicat

Des manifestants devant le Collège Boréal. Crédit image: Étienne Fortin-Gauthier

TORONTO – Alors que la grève dans les 24 collèges de l’Ontario continue, les membres du Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario (SEFPO) croient que le gouvernement doit « moralement » jouer un rôle dans le conflit afin de ramener les deux parties à la table de discussion.

JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72

« Il (le gouvernement) ne peut plus s’en laver les mains et dire que nous devons retourner à la table », s’est exclamée Mona Chevalier, la présidente du local 470 du SEFPO et représentante des employés du collège La Cité, à Ottawa.

Après presque de deux semaines de conflit, Mme Chevalier croit que le gouvernement a un devoir moral d’aller plus loin que les simples paroles.


« Il (le gouvernement) tient ces paroles depuis un bout déjà, mais de toute évidence, ça ne force pas le Conseil des employeurs des collèges à revenir à la table pour négocier de bonne foi. » – Mona Chevalier


Elle se désole aussi de voir que la position du Conseil des employeurs des collèges n’a pas changé et que le semestre de quelque 500 000 étudiants à travers l’Ontario est en danger.

« À ce point-ci, on fait face à un employeur qui n’est pas raisonnable depuis le départ. Nous n’avons eu aucune marge de manœuvre, ce n’est pas de la négociation, mais de l’imposition », a expliqué la représentante syndicale.

Mme Chevalier dit compatir avec les craintes des étudiants et note que la frustration partagée par certains d’entre eux se fait aussi ressentir chez les enseignants.

Du côté du Conseil des employeurs des collèges (CEC), on qualifie la grève de « non nécessaire ».

« Les collèges ont toujours été prêts et disponibles pour revenir à la table de négociation en se basant sur la dernière offre patronale », a expliqué Don Sinclair, président du CEC, par voie de communiqué.

Les employeurs ont estimé que les demandes du SEFPO coûteraient 250 millions $ annuellement et qu’elles « mettraient en péril la qualité des programmes des collèges ».

« Nous voulons mettre fin au conflit pour permettre à nos étudiants de revenir dans les salles de classe. La SEFPO doit revenir à la table de discussion avec des solutions pratiques et abandonner ses positions qui sont inabordables et dangereuses pour la qualité des programmes. »

Le CEC a également indiqué être en contact avec un médiateur et espère la reprise des pourparlers.

Le gouvernement n’est pas prêt à agir

Le gouvernement pourrait mettre fin au conflit en adoptant une loi, mais cette mesure est « un dernier recours », note la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Formation professionnelle, Deb Matthews. Pour elle, la situation n’est pas encore rendue là.

« Je ne répondrai pas à des questions hypothétiques, mais il faut que les deux parties se parlent », a jugé la ministre.

Mme Matthews se dit également « ouverte à toutes les options », tout en rappelant que le gouvernement n’était pas à la table de discussion.

Par ailleurs, la ministre Matthews a rencontré des étudiants avant la période des questions du 25 octobre et dit avoir eu une « bonne » discussion sur le sujet avec eux.

« Je suis très inquiète des impacts de cette grève sur nos étudiants », a assuré Mme Matthews.

La ministre a avoué aux médias être « déçue » de voir que les négociations n’ont toujours pas repris, mais dit en même temps ne pas croire que les étudiants vont perdre leur semestre à cause de la grève.

La première ministre doit s’impliquer, selon Brown

Le chef du Parti progressiste-conservateur (Parti PC) de l’Ontario, Patrick Brown, a demandé une implication directe de la première ministre de l’Ontario, Kathleen Wynne, pour s’attaquer à ce conflit.


« La première ministre doit s’atteler au dossier. Je suis très inquiet de voir que les étudiants vont peut-être perdre le semestre, mais le gouvernement semble être d’accord de laisser aller les choses » – Patrick Brown


Selon le chef de l’opposition officielle, il est « raisonnable » que les étudiants demandent un remboursement de leurs frais de scolarité.

Peter Tabuns, le député du Nouveau Parti démocratique (NPD) de l’Ontario croit pour sa part que le gouvernement doit s’attaquer à la source du problème, soit le sous-financement des collèges.

Parmi les points de litiges, la précarité des emplois des enseignants est en haut de la liste. Selon la SEFPO, la direction des collèges aurait eu tendance à embaucher plus de personnel contractuel, ce qui nuit à la qualité de l’enseignement. D’autres points de discordes sont aussi en jeu, comme la gestion des salles de cours et les techniques d’enseignement.

La dernière grève des enseignants des collèges remonte à 2006. L’arrêt de travail avait alors duré trois semaines. La convention collective des enseignants des collèges est arrivée à échéance à la fin du mois de septembre.