Encore du travail à faire pour les femmes francophones

Pour l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC), les femmes francophones sont victimes d’un double oubli dans le débat. (Photo: Thinkstock)
Pour l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne, les femmes francophones sont victimes d’un double oubli. Thinkstock

OTTAWA – Différents groupes qui luttent contre la violence faite aux femmes dans la francophonie minoritaire au Canada ont rappelé l’importance d’offrir des services d’aide aux victimes dans leur langue, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, mercredi 25 novembre.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Action ontarienne contre la violence faite aux femmes (AOcVF) dit que les besoins des organismes francophones d’aide aux femmes demeurent urgents. À commencer par ceux des neuf Centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) francophones.

« Depuis plusieurs mois, il y a plus de demandes et plus d’appels de femmes en difficulté dans nos centres », partage Maïra Martin, directrice générale d’AOcVF, à #ONfr.

AOcVF insiste sur une meilleure prise de conscience par rapport à la violence faite aux femmes. L’organisme dit avoir maintenant plus de ressources pour atteindre ses objectifs depuis l’annonce d’un plan de 41 millions $ sur trois ans pour lutter contre le harcèlement et la violence sexuels, au printemps. Mais il manquerait toujours, selon lui, des références spécifiques à la francophonie dans le document.

À Queen’s Park aussi, la prévention est le mot d’ordre.

« Je suis très préoccupée par la violence contre toutes les femmes », a fait savoir Tracy MacCharles, la ministre ontarienne de la Condition féminine, citant particulièrement les femmes francophones et autochtones. « Nous devons faire face à ces problèmes avec vérité et honnêteté. Nous devons travailler du côté de la prévention », a-t-elle ajouté. « Nous avons déjà investi considérablement dans des services d’interprètes pour des services d’aide aux femmes victimes de violence conjugale et d’autres formes de violence. »

Une étude de Statistique Canada, parue le 23 novembre, confirme par ailleurs que les femmes des Premiers Peuples risquent davantage d’être victimes de violence que tout autre groupe de femmes au pays. L’an dernier, elles auraient rapporté trois fois plus de cas d’agressions sexuelles que chez les femmes non autochtones.

La première ministre ontarienne Kathleen Wynne a rencontré des membres de la Table ronde permanente de l’Ontario sur la lutte contre la violence faite aux femmes à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.

« Nous devons continuer à être vigilants dans nos efforts visant à changer des attitudes et des comportements fortement enracinés (…) qui donnent lieu à de la violence conjugale de même qu’à de la violence et à du harcèlement sexuels », a déclaré Mme Wynne dans un communiqué, le 25 novembre. « Notre société a grandement progressé dans la reconnaissance des droits des femmes et de l’égalité des sexes. Mais il reste encore bien des choses à faire. »

« Graves lacunes »

Selon les données policières, un peu plus de 173600 femmes de 15 ans et plus au Canada ont été victimes d’un crime violent en 2011.

« Nous avons d’importantes préoccupations. Les chiffres de 2011 sont loin d’être meilleurs aujourd’hui, et il y a encore de graves lacunes en termes de services offerts, notamment les services de première ligne », s’inquiète Blandine Ngo Tona, présidente de l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC). « Nous proposons une nouvelle approche impliquant des hommes, mais également les femmes victimes, pour les inclure dans les solutions à développer. »

En avril 2015, l’AFFC, en concertation avec ses organismes membres, a proposé au gouvernement fédéral un projet pilote qui aurait été mis en place au Manitoba, en Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick et au Yukon, visait à développer une stratégie intercommunautaire permettant de collecter des données et de meilleures pratiques pour développer de nouvelles solutions d’intervention plus efficaces.

La ministre canadienne de la Condition féminine de l’époque, la Dre Kellie Leitch, n’a jamais donné suite au projet de l’AFFC. À peine nommée, la nouvelle ministre Patty A. Hajdu suscite donc déjà beaucoup d’attentes.

« Nous espérons que la nouvelle ministre va vite prendre la mesure de l’ampleur du problème. Celui-ci est rendu encore plus grand quand les victimes ne peuvent avoir accès à des services dans leur langue alors qu’elles sont en situation de détresse », exhorte Mme Ngo Tona à #ONfr. « Il faut que tous les acteurs travaillent ensemble pour développer des solutions. »

Le premier ministre canadien Justin Trudeau a prêché à son tour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le 25 novembre.

« La violence faite aux femmes est une violation des droits les plus fondamentaux. Elle détruit des vies, déchire des familles, a une incidence négative sur des communautés entières, et n’a pas de place dans notre société », a déclaré M. Trudeau depuis Londres, où il a rencontré la reine Elizabeth II. « Cette journée nous rappelle que les femmes et les filles, en particulier les Autochtones, sont encore aujourd’hui susceptibles d’être victimes de violence dans notre société. Cela doit changer. »