Éducation en français : le Sénat en appelle au fédéral

Le RESDAC a pour mission de concerter, coordonner et assurer la cohésion des niveaux d’alphabétisme et de compétences essentielles des adultes francophones de tout le Canada. Crédit image: Pixabay

VANCOUVER – Le comité sénatorial des langues officielles a rendu public, le 31 mai, à Vancouver, un rapport sur l’accès à l’éducation en français en Colombie-Britannique. Mais les recommandations des sénateurs concernent aussi les autres provinces.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Dans leur rapport intitulé Horizon 2018 : Vers un appui renforcé à l’apprentissage du français en Colombie-Britannique, les sénateurs jugent l’accès à l’école en français menacé en Colombie-Britannique, faute d’infrastructures adéquates.

Le dossier de l’éducation dans cette province est particulièrement sensible et a récemment fait l’objet de plusieurs recours devant les tribunaux, notamment dans le dossier de l’école Rose-des-Vents. En septembre dernier, la Cour suprême de Colombie-Britannique avait partiellement donné raison aux francophones sans que des avancées notables n’aient eu lieu depuis.

Parmi les 17 recommandations contenues dans le rapport, les sénateurs demandent au ministère des Services publics et de l’Approvisionnement d’intervenir auprès de la Société immobilière du Canada pour qu’elle cède des terrains au Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique à Vancouver afin d’y construire deux écoles. Les représentants de la Chambre haute demandent également au ministère du Patrimoine canadien de conclure une entente spéciale avec le ministère de l’Éducation de la Colombie-Britannique pour répondre aux besoins pressants des francophones en termes d’infrastructures.

La présidente de la Fédération des parents francophones de la Colombie-Britannique (FPFCB), Marie-Pierre Lavoie, accueille favorablement le rapport du Comité sénatorial.

« Il parait juste, et nous sommes très contents des recommandations. »

Les besoins criants mis en exergue par les sénateurs ne seraient pas sans conséquence pour les enfants, explique la présidente.

« Ça arrive tous les jours que des enfants francophones aillent vers les écoles anglophones. Nous n’avons pas assez de places pour les garderies périscolaires. Il y a actuellement 500 places dans les écoles pour ces services de garde. Or, on estime le besoin potentiel à 4 000 places! »

Le manque de moyens pour les écoles se ferait aussi sentir en dehors des salles de classe.

« Il n’y a pas assez d’argent alloué pour le transport en autobus des élèves vers les écoles francophones. Certains enfants doivent faire plus d’une heure de transport par jour pour se rendre à l’école. »

 

Des recommandations pour toutes les provinces

Si la situation en Colombie-Britannique est jugée critique et justifie donc un tel rapport selon les sénateurs, plusieurs de leurs recommandations pourraient profiter à tous les francophones à l’extérieur du Québec, juge la présidente du comité sénatorial des langues officielles, la franco-albertaine Claudette Tardif.

Claudette Tardif
La présidente du comité sénatorial des langue officielles, la sénatrice franco-albertaine, Claudette Tardif. (Archives, #ONfr)

« Notre rapport porte sur la Colombie-Britannique, mais nos conclusions s’appliquent à l’ensemble du pays. Le Canada célèbre cette année le 150e anniversaire de la Confédération et l’année 2019 marquera le 50e anniversaire de l’adoption de la Loi sur les langues officielles. Le moment ne saurait être mieux choisi pour que le gouvernement fédéral réaffirme haut et fort son engagement à promouvoir les deux langues officielles du Canada, qui sont au cœur de l’identité canadienne.  »

À commencer par celle concernant la priorité que pourrait donner la Société immobilière du Canada aux communautés de langue officielle en situation minoritaire.

« C’est quand même aberrant que quand la Société immobilière du Canada vend des terrains ou des établissements dont le fédéral ne sert plus, elle se tourne vers des compagnies privées qui ont beaucoup plus de moyens que nos conseils scolaires qui en auraient grandement besoin! », juge Roger Paul, directeur général de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones (FNCSF).

Le gouvernement devrait également, selon les sénateurs, lancer une campagne nationale de promotion du bilinguisme et une autre sur les mérites de l’éducation en français, tout en accroissant le financement des programmes en français de la petite enfance jusqu’au postsecondaire, le tout d’ici 2018.

 

Les sénateurs appuient une modification du recensement

Le rapport est d’autant bien accueilli par la FNCSF que le comité sénatorial appuie aussi deux dossiers jugés prioritaires par l’organisme.

Les sénateurs se rangent notamment du côté de la FNCSF pour que les francophones soient inclus dans les négociations entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires pour le renouvellement du Protocole d’entente en éducation et que les sommes transférées par Ottawa pour l’éducation en français fassent l’objet d’une meilleure reddition de comptes.

Ils recommandent également la modification du questionnaire du recensement pour mieux comptabiliser les ayants droit, telle que demandée par la FNCSF et par l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA).

Le président de l’ACFA, Albert Nolette, appelle le gouvernement à l’action dans le dossier du recensement.

« Il est grand temps que les ministres Bains et Joly ainsi que Statistique Canada jouent un rôle de leadership dans le dossier du recensement afin que les communautés d’expression française de partout au pays aient enfin accès aux données complètes et fiables dont elles ont grandement besoin. Nous souhaitons vivement un engagement clair de la part du gouvernement. »

Le directeur général de la FNCSF se montre optimiste.

« Les astres semblent être alignés car dans ces deux dossiers, nous avons l’appui du comité permanent des langues officielles et de son homologue sénatorial. Cela nous donne de bonnes chances d’être entendues par le gouvernement fédéral qui serait mal placé de dire « non » quand deux comités se prononcent en faveur de telles mesures qui seraient extrêmement positives pour nos communautés francophones. »