Des projets qui coûtent cher, selon la VG

Le complexe de recherche médicale MaRS, au centre-ville de Toronto.

TORONTO – Le gouvernement libéral de l’Ontario a dépensé 8 milliards $ de trop dans des partenariats avec le secteur privé et a « risqué » l’argent du public dans l’affaire MaRS, affirme la Vérificatrice générale de la province.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

Le rapport annuel de la vérificatrice Bonnie Lysyk est tombé comme une masse sur le parquet de l’Assemblée législative, le mardi 9 décembre.

La VG soutient que les partenariats public-privé finissent par coûter plus cher que les projets entièrement gérés par la province, parce que les coûts d’emprunt sont plus élevés pour le secteur privé.

« Ça démontre que si le secteur public est capable de mener à bien des projets (d’infrastructure), à temps et sans dépassement de coûts, il est possible d’épargner l’argent des contribuables », a déclaré Mme Lysyk lors d’un point de presse à Queen’s Park.

Les coûts d’emprunt du secteur privé pour 74 projets d’infrastructure s’élèvent à 8 milliards $ au-dessus de ce que la province aurait eu à payer pour administrer elle-même ces chantiers, selon la VG.

Le gouvernement libéral de Kathleen Wynne a immédiatement rejeté les conclusions de la vérificatrice et réaffirmé sa confiance dans le programme Infrastructure Ontario.

« La vaste majorité des prêts sont remboursés à temps », a fait savoir Brad Duguid, ministre du Développement économique, de l’Emploi et de l’Infrastructure. « Les pertes sont rares. Sur 800 prêts, un seul a occasionné des problèmes ou des pertes ».

M. Duguid affirme, au contraire, que la province a économisé 6 milliards $ en faisant équipe avec le secteur privé pour certains projets d’infrastructure.

Le pari « risqué » de MaRS

La VG de l’Ontario conclut aussi que le gouvernement provincial a fait un pari « risqué » lorsqu’il a accordé, il y a quatre ans, un prêt de 224 millions $ à MaRS pour greffer une tour à bureaux à son complexe de recherche médicale au centre-ville de Toronto.

« Le manque de transparence par rapport aux objectifs (…) de ce prêt donne l’impression que cette transaction était un renflouement d’un organisme non-gouvernemental », a souligné Mme Lysyk devant la presse.

Plus tôt cette année, le clan libéral aurait conclu, pour la somme de 65 millions $, l’achat de cette phase deux du complexe MaRS afin de renflouer l’organisme qui a été incapable de louer plus du tiers de la superficie de sa nouvelle tour à bureaux.

M. Duguid rétorque que MaRS est « un investissement solide » et que le prêt de la province sera « totalement remboursé ».

Gord Nixon, président du conseil d’administration de MaRS, se dit pour sa part « confiant de louer tout l’espace » vacant dans la phase deux du complexe de recherche situé à un jet de pierre de Queen’s Park.

Sur les banquettes de l’opposition, on a continué à dénoncer « un manque de responsabilité et de transparence » dans l’affaire MaRS, le 9 décembre. « MaRS n’aurait jamais dû pouvoir commencer la construction d’une phase deux sans un bon plan d’affaires », a pesté Jim Wilson, chef progressiste-conservateur par intérim.

Compteurs intelligents

Dans son rapport annuel, Bonnie Lysyk se questionne aussi sur la pertinence des compteurs intelligents d’électricité qui, selon ses chiffres, ont coûté presque deux fois plus cher que prévu à installer et n’ont pas engendré les économies voulues pour les consommateurs.

La VG estime que l’installation de ces compteurs à la grandeur de la province a coûté 1,9 milliard $ alors que le ministère de l’Énergie avait placé la barre à 1 milliard $.

Le passage aux compteurs intelligents serait « un échec », de l’avis de Mme Lysyk.

« C’est un bon investissement », a vivement réagi Bob Chiarelli, ministre de l’Énergie, ajoutant être « en désaccord professionnel » avec la VG sur la question du coût réel des compteurs intelligents.

Pressé de questions, M. Chiarelli a fini par admettre, du bout des lèvres, que le remplacement des compteurs d’électricité avait coûté 1,4 milliard $, soit tout de même 40% de plus que l’estimé de départ.

La chef néo-démocrate Andrea Horwath croit, pour sa part, que les libéraux ont « complètement perdu contact » avec la réalité. « La seule chose plus effroyable que ce rapport (de la VG) est l’arrogance du gouvernement », a-t-elle fustigé à son tour.

Autres conclusions de la Vérificatrice générale :

– Plus de 14 000 personnes vivant avec un handicap intellectuel sont sur la liste d’attente pour une place dans une résidence.

– Le ministère de la Santé et des Soins de longue durée perd la trace d’environ 1 million de vaccins contre la grippe annuellement.

– Le ministre de l’Environnement tarde à approuver localement des plans de protection de l’eau potable, malgré un resserrement des lois à la suite du scandale mortel de l’eau contaminée à Walkerton.