Ces mesures ont pour but d'attirer et intégrer des immigrants francophones à l’extérieur du Québec. Archives ONFR

Prioriser la venue de travailleurs francophones, augmenter la présence canadienne en Afrique et faciliter l’accès à la résidence temporaire pour les étudiants internationaux sont quelques-unes des mesures que contient la nouvelle politique en immigration francophone dévoilée par Ottawa pour doubler son nombre d’immigrants francophones hors Québec d’ici 2028.

Une politique en immigration francophone, c’est la stratégie du gouvernement fédéral pour attirer et intégrer des immigrants francophones à l’extérieur du Québec, comme en Ontario et au Nouveau-Brunswick. Son but est de rétablir le poids démographique des francophones hors Québec à 6,1 %, comme c’était le cas en 1971, et qui est à 3,3 % aujourd’hui, selon les plus récentes données du recensement de 2021.

« L’idée derrière la politique est de s’assurer que le fédéral fasse son travail », affirme d’emblée en entrevue Marc Miller, le ministre de l’Immigration. Ottawa n’a atteint qu’à une seule reprise, depuis 20 ans, son objectif d’immigration francophone de 4,4 %, soit en 2022.

Des cibles annuelles d’immigrants francophones

La politique oblige le département de l’immigration à se doter d’une cible de nouveaux arrivants francophones hors Québec et à revoir celle-ci, année après année. Pour 2024, le gouvernement fédéral a établi une cible de 6 % qui augmentera à 7 % et 8 %, les deux années suivantes, mais Marc Miller a indiqué qu’il pourrait revoir celles-ci à la hausse, à la fin de 2024.

Un accès à la résidence permanente plus rapide pour les travailleurs et étudiants étrangers

Ottawa veut accélérer l’accès à la résidence permanente pour les immigrants temporaires, comme les travailleurs et les étudiants d’expression française. Il se fixe comme objectif d’augmenter, année après année, leur nombre et leur proportion hors Québec. Il souhaite aussi augmenter la part de francophones dans ces catégories d’immigrants économiques, avec le développement d’un nouveau programme et de mesures voués à l’immigration francophone économique. On parle aussi d’un corridor spécialement dédié pour faire venir des enseignants de français.

« Il y a des efforts (de plus) qu’on peut déployer au Canada, lance Marc Miller, en parlant des personnes à statut temporaire. Ce sont des gens qui se sont déjà intégrés, en allant à l’école au Canada, alors ce sont des éléments qui sont sur la table. »

Marc Miller, ministre des Relations Couronne-Autochtones ne ferme pas la porte quant à voter contre le projet de Loi C-13. Crédit image : Stéphane Bédard.
Marc Miller est ministre de l’Immigration depuis juillet 2023. Crédit image : Stéphane Bédard.

Une lentille francophone

Le ministre de l’Immigration mise sur l’importance d’inclure des cibles et des indicateurs de volume pour que les fonctionnaires respectent ceux-ci au sein de cette stratégie. Cette politique inclut une lentille francophone dans l’ensemble des programmes du ministère, que ce soit, par exemple, dans la catégorie des candidats économiques, des réfugiés ou encore des travailleurs spécialisés.

La Loi sur les langues officielles, récemment modernisée en juin, encourage les ministères à ne pas prendre de mesures qui nuiraient à l’épanouissement des minorités francophones ou atténuer les impacts de politiques pro-francophones. IRCC indique justement qu’il mettra une directive en place à l’intention de ses agents de recrutement et employés pour « évaluer l’effet de ces nouvelles initiatives sur l’atteinte des objectifs de la politique ».

Augmenter la promotion du Canada, notamment en Afrique

Le gouvernement veut augmenter ses efforts d’attraction dans les pays à locuteurs du français, car les candidats francophones ne se bousculent pas aux portes canadiennes. On parle notamment de cibler des zones précises en Asie et en Afrique de l’Ouest et du Nord, comme le Sénégal, l’Algérie et le Maroc, en augmentant les efforts de promotion et d’attraction de la francophonie canadienne.

Le ministre Marc Miller suggère d’augmenter le nombre de missions canadiennes, notamment en collaboration avec les employeurs et les intervenants francophones du pays.

« En regardant l’état du français à travers le monde, ça ne devrait pas être si difficile d’aller chercher des gens qui parlent français. C’est quand même la 5e ou 6e langue la plus parlée au monde », explique-t-il.

Collecte de données sur l’immigration francophone

Le département de l’immigration fédéral veut mieux colliger les données et faits au sujet des immigrants francophones et leurs parcours, une fois arrivés au Canada. IRCC se donne comme objectif, en partenariat avec Statistique Canada, d’élaborer une vingtaine de projets de recherche en lien avec l’immigration francophone d’ici 2028.

Le ministre Miller estime qu’il sera nécessaire d’avoir une discussion sur l’intégration des immigrants francophones dans les plus petites communautés du pays, avant de parler d’augmenter les cibles.

« L’immigration est un début, mais pas l’entièreté de la conversation… Je ne peux pas demander à un couple du Vietnam d’être le porte-étendard du fait français hors Québec et d’être des Acadiens du jour au lendemain, ça ne se fait pas. Ce n’est pas du bétail, on ne peut pas leur demander de rester sur place », explique-t-il.