Bilan 2017 : les langues officielles en retrait

Une délégation de Franco-Ontariens participe au Parlement francophone des jeunes des Amériques. Crédit photo: Rym Ben Berrah

L’année 2017 a été marquée par un manque d’avancées en matière de langues officielles, à l’échelon fédéral, malgré la publication de plusieurs chiffres inquiétants.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

UN CHIFFRE

2,8 %

C’est le pourcentage de francophones à l’extérieur du Québec que comptera le Canada d’ici 2036, selon une étude de Statistique Canada, intitulée Regard sur l’immigration, la diversité ethnoculturelle et les langues au Canada, 2011 à 2036. Publié en janvier, ce portrait démographique du Canada pour les années à venir ne manque pas d’inquiéter les organismes porte-paroles de la francophonie canadienne en milieu minoritaire, même si l’institution statistique précise que le français demeurera la langue maternelle la plus importante après l’anglais, avec 7,8 millions de personnes en 2036, selon les projections.

Les données également diffusées tout au long de l’année par Statistique Canada, à l’issue du recensement de 2016, semblent confirmer cette tendance. Dans la lignée des derniers recensements, le nombre de locuteurs francophones augmente en valeur absolue, mais la proportion diminue, apprend-on en août. À l’extérieur du Québec, la population ayant déclaré le français comme première langue officielle parlée a cru de 13 780, avec un nombre de 1 021 308, mais le français ne représente plus que 3,8 % des résidents en contexte minoritaire, contre 4 % en 2011 et 4,2 % en 2006. En novembre, Statistique Canada révèle également que l’anglais est la langue unique de travail pour neuf travailleurs sur dix, à l’extérieur de la Belle province.

UNE CITATION

« Vous n’avez pas eu le temps pour vous donner l’espace de neutralité, de distance qui vous permettrait de nous convaincre aujourd’hui que vous avez cette capacité-là d’exercer vos fonctions de commissaire aux langues officielles de manière indépendante. »

L’année 2017 a été marquée par le feuilleton entourant la nomination d’un nouveau commissaire aux langues officielles du Canada.

Cette phrase, lancée par le sénateur libéral Serge Joyal, le 5 juin lors de sa comparution devant la Chambre haute, met sans doute un terme aux espoirs de Madeleine Meilleur d’obtenir l’appui des deux chambres pour succéder à Graham Fraser. Jugée trop proche du Parti libéral du Canada (PLC), marquée par son récent passé de ministre libérale provinciale en Ontario, Mme Meilleur se retire finalement de la course, deux jours plus tard.

Le gouvernement reprend alors le processus de nomination et finalement, propose la candidature du recteur et vice-chancelier de l’Université de Moncton, le Franco-Manitobain, Raymond Théberge pour devenir le septième commissaire aux langues officielles. Un choix finalement confirmé par la Chambre des communes le 13 décembre, dernier jour des travaux parlementaires.

UNE DATE

25 octobre 

La Cour suprême du Canada. Crédit image : Courtoisie Sénat

Le projet de loi du député néo-démocrate, François Choquette, visant à rendre obligatoire la nomination de juges bilingues à la Cour suprême du Canada, est défait dès la deuxième lecture, le mercredi 25 octobre.

Le porte-parole aux langues officielles du Nouveau Parti démocratique (NPD) ne parvient pas à faire mieux que son prédécesseur, Yvon Godin, qui avait fait plusieurs tentatives en 2008, 2010 et 2014, pour obliger que les juges choisis à la Cour suprême du Canada « comprennent le français et l’anglais sans l’aide d’un interprète ».

Le Parti libéral du Canada avait pourtant appuyé un projet de loi identique, en 2010. Mais le premier ministre dit craindre qu’une telle modification de la Loi sur la Cour suprême n’oblige à rouvrir la constitution et s’appuie sur sa nomination des juges Malcom Rowe, puis Sheila L. Martin, au plus haut tribunal du pays, pour démontrer son intention de nommer uniquement des juges bilingues. Face à la grogne, le gouvernement ouvre toutefois la porte pour trouver un mécanisme afin d’assurer la pérennité de cette pratique.

UN LIEU

Moncton

Le Nouveau-Brunswick accueille, en mars, le premier Forum ministériel sur l’immigration francophone. À Moncton, les ministres des provinces et territoires en charge des dossiers de la francophonie et de l’immigration se réunissent avec le ministre l’Immigration, des Réfugiés et de Citoyenneté, Ahmed Hussen, afin d’établir des pistes de solution pour atteindre la cible 4,4 % d’immigration francophone à l’extérieur du Québec d’ici 2023.

Ce premier exercice s’achève avec l’annonce d’une modification linguistique au programme Entrée express, pour donner plus de points aux locuteurs francophones, et la promesse de poursuivre le dialogue. « Un petit pas dans la bonne direction », déclare la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, à l’issue de la réunion.

Une deuxième édition est prévue au printemps 2018, en Ontario.

UNE PERSONNALITÉ

Jean Johnson

En juin, le Franco-Albertain Jean Johnson, ancien président de l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA), remporte la course à la présidence de la FCFA. Il défait la présidente sortante, Sylviane Lanthier, à l’issue d’un vote très serré, après deux tours.

Alors que celle-ci propose d’assurer la continuité, M. Johnson promet pour sa part du changement, insistant sur l’importance de faire mieux connaître l’organisme et de lui donner davantage de visibilité sur la colline parlementaire.

Ce changement s’ajoute à celui enregistré à la direction générale de l’organisme porte-parole des francophones en milieu minoritaire, deux mois plus tôt. En avril, la FCFA annonce la nomination du Franco-Ontarien, Alain Dupuis, ancien directeur général du Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), pour prendre la succession de l’Acadienne Suzanne Bossé, qui avait quitté ses fonctions au mois d’octobre 2016.


POUR EN SAVOIR PLUS : 

Jean Johnson élu président de la FCFA

Madeleine Meilleur retire sa candidature

Juges bilingues à la Cour suprême : Choquette insiste

Immigration : Entrée express aura une composante francophone