Alfred : « nouvelle gouvernance » recommandée

Le Collège d'Alfred.

TORONTO – Un facilitateur nommé par l’Ontario pour envisager l’avenir du collège d’Alfred, dans l’est de la province, recommande de placer l’établissement sous la houlette d’un nouveau Conseil de formation agricole (CFA) auquel siégeraient, entre autres, les collèges Boréal et La Cité.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

« Le campus d’Alfred offre un potentiel d’exploitation et de croissance énorme, moyennant une nouvelle gouvernance et une stratégie de redéploiement des activités de l’institution et du campus », écrit le facilitateur Marc Godbout dans un rapport que la province a rendu public, le jeudi 18 décembre.

L’avenir du collège d’Alfred demeure incertain depuis que l’Université de Guelph (UdeG) a décidé de s’en désinvestir pour des raisons financières, à la mi-mars. Les collèges Boréal et La Cité y assurent la continuité des études, dans l’attente d’une solution sur le long terme.

Le collège agricole de langue anglaise à Kemptville, également délesté par l’UdeG, vit la même incertitude.

Le CFA que propose M. Godbout aurait le mandat de « donner les orientations et traduire les besoins du milieu (agricole) en matière de programmation et de services d’appui à la clientèle apprenante ». Il prendrait la place du Conseil communautaire du collège d’Alfred, qui a assuré pendant une quinzaine d’années la liaison entre l’UdeG et la communauté agricole francophone de l’Est ontarien.

Partage de la gestion

Dans son rapport, Marc Godbout exclut d’emblée la création d’un nouveau collège entièrement autonome à Alfred. Les recommandations du facilitateur vont plutôt dans le sens d’un partage de la programmation et des opérations du campus agricole entre les collèges Boréal et La Cité.

Les deux collèges franco-ontariens « opèrent déjà selon un mode de gouvernance établi, ne donnant ainsi aucun lieu à la création d’une nouvelle entité morale et légale », précise M. Godbout, un ancien sous-ministre adjoint de l’Éducation et un ancien député libéral à Ottawa, dans son rapport d’une centaine de pages.

Le campus d’Alfred pourrait ainsi jouir, par association, de la désignation de Boréal et de La Cité en vertu de la Loi sur les services en français de l’Ontario.

M. Godbout suggère donc que les programmes et les opérations aux installations d’Alfred tombent définitivement sous la responsabilité du collège La Cité, dont le campus principal est situé à Ottawa. Il suggère ensuite que le collège Boréal garde le contrôle de la programmation qu’il offrait déjà conjointement avec Alfred au moment où l’UdeG a décidé de larguer son campus satellite.

Alfred et Boréal offrent, entre autres, un programme conjoint de techniques de soins vétérinaires.

« Urgence d’agir »

De l’avis de Marc Godbout, il y a une « urgence d’agir ».

« Les chances de survie du campus d’Alfred seront faibles si un virage important n’est pas effectué au plan de sa mission, non seulement comme lieu de formation, mais comme composante essentielle et moteur du développement économique de la région », exhorte le facilitateur dans son rapport.

Pour favoriser ce développement économique, M. Godbout propose la mise sur pied d’un Consortium de formation et d’innovation en transformation agroalimentaire (CFITA) à Alfred. Ce consortium réunirait des agriculteurs, des élus et des entrepreneurs, entre autres. Il serait géré par un organisme sans but lucratif.

Les installations d’Alfred, elles, demeureraient la propriété de l’Institut de recherche agricole de l’Ontario.

Besoins et répercussions

La communauté agricole de l’Est ontarien accueille favorablement le rapport Godbout.

« M. Godbout nous propose une vision très intéressante et ambitieuse pour l’avenir du collège d’Alfred et de la formation agricole en français en Ontario. Nous avons maintenant besoin des ressources nécessaires pour pouvoir développer notre collège et concrétiser cette vision », a réagi Marc Laflèche, président de l’Union des cultivateurs franco-ontariens, le 19 décembre.

Le gouvernement libéral à Queen’s Park promet, de son côté, de faire l’examen de la meilleure solution pour Alfred en tenant compte « des besoins actuels et prospectifs des étudiants » et « des répercussions économiques et fiscales », d’ici la fin janvier.

« Nous travaillons en vue d’assurer à tous les étudiants concernés qui sont actuellement inscrits qu’ils auront la possibilité de terminer leur programme et que leurs études ne seront pas interrompues », ont fait savoir Jeff Leal, ministre de l’Agriculture, et Madeleine Meilleur, ministre déléguée aux Affaires francophones, dans une déclaration conjointe, le 18 décembre.

Préoccupations

La direction du collège Boréal se dit, pour sa part, préoccupée par certaines recommandations du rapport Godbout qui, selon elle, « porteraient atteinte à l’autonomie respective des deux collèges de langue française » ou exigeraient « des investissements fort importants » de la province.

Dans un communiqué, l’établissement sudburois rappelle qu’il offre depuis 15 ans un programme conjoint de techniques de soins vétérinaires avec le collège d’Alfred. Suivant les recommandations du facilitateur, la portion de ce programme qui se donne dans l’Est ontarien pourrait bien passer dans le giron du compétiteur ottavien.

La Cité, elle, lit le rapport Godbout d’un œil positif.

« La vision proposée par le facilitateur est réalisable et présente une réelle compréhension des enjeux de l’ensemble des communautés agricoles et francophones de l’Ontario », a commenté Lise Bourgeois, présidente de La Cité, dans un communiqué.