Une nomination à l’Université d’Ottawa agace les francophones

Le campus de l'Université d'Ottawa.
Le campus de l'Université d'Ottawa. Archives ONFR+

OTTAWA – La nomination du grand patron d’Air Canada au poste de chancelier de l’Université d’Ottawa « envoie un drôle de message » aux étudiants francophones, disent-ils, étant donné la mauvaise réputation du transporteur aérien en matière de services en français.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

Calin Rovinescu, président et chef de la direction d’Air Canada depuis 2009 et lui-même diplômé en droit de l’Université d’Ottawa (Ud’O), sera le prochain chef titulaire de la plus grande maison bilingue d’enseignement supérieur au pays.

L’homme d’affaires succédera à Michaëlle Jean, élue en 2014 à la tête de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).

Le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) se dit toutefois agacé par l’arrivée de M. Rovincescu au poste très symbolique, mais aussi très public, de chancelier de l’Ud’O. C’est qu’en tant que patron d’un transporteur souvent blâmé pour ses manquements à l’égard du français, le nouveau visage de l’université bilingue est loin de convaincre les francophones qu’il a à cœur la langue de la minorité.

« Nous trouvons que la nomination de M. Rovinescu au poste de chancelier, une personne n’ayant pas une réputation très reluisante en ce qui concerne le respect des langues officielles au sein d’Air Canada, envoie un drôle de message de la part d’une institution qui se dit fière de son bilinguisme », affirme Rym Ben Berrah, coprésidente du RÉFO, dans un échange de courriels avec #ONfr.

Accrochages linguistiques

Pierre Allard abonde dans le même sens. Dans son blogue personnel, l’éditorialiste bien connu dans la région d’Ottawa note qu’Air Canada, sous la gouverne de Calin Rovinescu, s’est souvent attiré les foudres du commissaire fédéral aux langues officielles, Graham Fraser, à cause de ses manquements à la loi protégeant la minorité francophone au pays. Le chien de garde linguistique s’est même dit « décontenancé » dans son rapport annuel 2015 du peu d’efforts du transporteur public pour améliorer les services en français.

« C’est sous (le règne de M. Rovinescu) que s’accumulent toutes ces plaintes contre l’absence ou la pénurie de services en français. C’est sous son règne qu’une seule des 12 recommandations de M. Fraser a été prise en compte. Et c’est aussi sous son règne qu’Air Canada n’a pas adopté de mesures pour corriger les fautes répétées du transporteur aérien en matière linguistique », écrit M. Allard.

De son côté, l’Université d’Ottawa affirme à #ONfr qu’il ne lui revient pas « de commenter sur les dossiers qui relèvent de la compagnie aérienne (que M. Rovinescu) dirige ».

« Le nouveau chancelier de l’Université d’Ottawa a été nommé à la suite d’un processus de sélection rigoureux. L’Université est fière d’accueillir Calin Rovinescu, dont le parcours professionnel est remarquable », répond l’U’dO par le biais d’une déclaration écrite. « M. Rovinescu a fait preuve d’un grand leadership dans un secteur d’activité hautement concurrentiel et est reconnu partout dans le monde. Il sera un excellent ambassadeur bilingue de l’Université. »

La nomination de M. Rovinescu a été entérinée par le Bureau des gouverneurs de l’Ud’O, composé au tiers de francophones dont des personnalités médiatiques de la région d’Ottawa.

Rym Ben Berrah, du RÉFO, espère pour sa part que le nouveau chancelier de l’Université d’Ottawa « se montrera sensible aux besoins particuliers de la population franco-ontarienne au cours de son mandat et épousera la cause de la francophonie ».