Un organisme pancanadien francophone menacé de disparition

Des milliers d'apprenants tentent chaque année d'améliorer leurs compétences en littératie.

OTTAWA – Les temps sont difficiles pour le Réseau pour le développement de l’alphabétisme et des compétences (RESDAC). L’organisme pancanadien francophone manque de ressources financières pour assurer son avenir.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @SebPierroz

« Nous en saurons plus en mars prochain, mais la disparition de l’organisme est d’ores et déjà évoquée », confie à #ONfr la directrice par intérim Gabrielle Lopez. « Nous envisageons peut-être de le faire renaître sous une autre forme. »

Parmi les options déjà sur la table : la possibilité de s’associer à un autre groupe, ou encore l’idée de devenir une « entreprise sociale ».

L’organisme crée en 1991 sous le nom de Fédération canadienne pour l’alphabétisation en français (FCAF), et représentant les groupes et associations francophones d’alphabétisation, n’a en fait plus les moyens de jouer son rôle de promotion à travers le pays. « C’est très difficile de vivre avec des fonds de projets. Nous survivons, car nous avons fait auparavant quelques réserves. »

Une seule personne est aujourd’hui employée à « temps partiel » au sein du RESDAC, contre six il y a encore « quelques années », précise Mme Lopez.

En cause : les subventions obtenues de la part du gouvernement fédéral, le bailleur de fonds principal, sont en « net recul », affirme l’organisme. Sans citer un chiffre, la directrice générale parle de « centaines de milliers de dollars annuels ».

Le groupe avait d’ailleurs essuyé un sérieux revers en mai 2013, après qu’Emploi et Développement social Canada (EDSC) eut décidé de ne pas lui accorder un financement pour un « projet majeur ».

Sur le terrain, le RESDAC n’est aujourd’hui plus capable d’exercer sa mission première. À savoir l’offre de services de promotion et de sensibilisation à l’alphabétisation, et ce en partenariat avec la dizaine d’associations membres.

Contrairement à ces dernières, le RESDAC n’est pas en contact direct avec les apprenants. Reste que son apport n’en est pas moins précieux. « Avec une équipe plus grande, on pourrait faire un travail de mobilisation et de recherche beaucoup plus important », explique Mme Lopez.

 

Besoins

Les signaux d’alarme sont en tout cas tirés, d’autant que les francophones du Canada auraient des besoins légèrement plus élevés en matière d’alphabétisation. 49% d’entre eux auraient des difficultés à lire et comprendre un simple texte, contre 48% pour les anglophones.

C’est ce qui ressort d’un premier rapport pancanadien sur la PEICA (Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes) dévoilé en 2013. Le document avait mis par ailleurs en lumière les difficultés plus prononcées des francophones au Nouveau-Brunswick où le même chiffre atteignait 62%.

Le même rapport, basé sur des tests de compétences en littératie, montre des résultats beaucoup plus similaires entre les deux groupes linguistiques concernant les provinces du Québec, de l’Ontario et du Manitoba.

« L’ouverture d’écoles francophones a permis de refaire le rattrapage », soutient Mme Lopez. « Mais le taux d’exogamie en hausse chez les francophones affecte maintenant les performances en français. C’est tout un défi. »

Campagne électorale oblige, le RESDAC n’a pas manqué d’alerter les principaux partis politiques sur les manques en alphabétisation. Notamment en faisant valoir que les 80 millions$ prévus par le Bureau de l’alphabétisation et des compétences essentielles (BACE) n’avaient selon lui pas été dépensés.

Au questionnaire envoyé par l’organisme, seul le Parti conservateur n’a pour le moment pas répondu.

À noter que le RESDAC représente l’un des 21 organismes membres de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA).