Service 3-1-1 en français : « No thanks »

L'hôtel de ville d'Ottawa. Archives ONFR+

OTTAWA – Une grande majorité de francophones ne feraient pas l’effort de demander le service en français lorsqu’ils composent le 3-1-1. C’est ce qui ressort en tout cas des chiffres des municipalités d’Ottawa et du Grand Sudbury, les deux villes de plus de 100 000 résidents en Ontario possédant le service dans la langue de Molière.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @SebPierroz

D’après les données obtenues par #ONfr, l’option du français ne serait prisée que par un très faible nombre d’appelants du numéro traditionnellement réservé aux services municipaux.

Le service 3-1-1 de la Ville du Grand Sudbury n’a reçu ainsi que 657 appels en français de janvier à juin 2015, soit une proportion de seulement 2,4% des communications globales. Une tendance semblable à l’intégralité de l’année 2014 2,3% des appels étaient effectués en français.

Le chiffre est somme toute dérisoire étant donné que 27% des résidents sont identifiés comme francophone selon la définition de Statistique Canada.

Il n’y a pas de quoi s’enorgueillir également du côté d’Ottawa. Bien que composée de 14% de francophones, la capitale du Canada n’a qu’une proportion d’appels en français au 3-1-1 de 5,5% en 2011, 6,2% pour 2012, et 6,5% pour 2013. Le chiffre baisse même à 5% pour l’année 2014.

Une donnée illustrant dès lors que deux résidents francophones de la capitale sur trois décideraient de s’adresser en anglais lorsqu’ils composent le 3-1-1.

« Nous sommes déçus que la tendance reparte à la baisse », indique le président de l’ACFO d’Ottawa, Alexandre Mattard-Michaud.

Son homologue à Sudbury, Joanne Gervais, est aussi tombée en bas de sa chaise à la lecture des chiffres : « C’est malheureusement une réalité pour les gens qui vivent en situation minoritaire. »

Force est de constater tout de même que les deux représentants n’ont pas la même interprétation des résultats. « Il se peut qu’il y ait du dérangement et un manque de résultats lorsqu’on compose le 3-1-1 à Sudbury », note Mme Gervais. « Parfois, nous (l’ACFO) nous apercevons que le temps d’attente pour une question spécifique en français est beaucoup trop long. Les résidents trouvent alors plus logique de demander le service en anglais. »

Pour le président de l’ACFO d’Ottawa, il faut en revanche « démystifier » la longueur du temps d’attente pour le service 3-1-1. « Il y a une fausse conception qu’il faut plusieurs minutes pour être servi en français. Ce n’est pas vrai. »

 

Sensibilisation

Pour pallier ces chiffres décevants, un maitre mot : sensibilisation. Les deux ACFO accordent en tout cas leur violon sur ce point. « Nous allons continuer à dire aux francophones d’utiliser le service en français », soutient M. Mattard-Michaud. « Cela se fera par l’intermédiaire de notre réseau, via notamment le web, les médias sociaux ou le bouche-à-oreille. »

Mme Gervais exhorte même les francophones à afficher leurs couleurs. « Ils sont souvent trop timorés et honteux de le faire. Le français est vu comme une langue parlée à la maison et non une langue publique. Nous nous continuer à nous battre pour changer cette mentalité. »

En mai dernier, un sondage sur les services en français dévoilé par la Ville du Grand Subdury avait apporté un élément de réponse troublant. L’étude montrait que la grande majorité des répondants en français n’utilisent pas le service car ils ignorent son existence (87%) ou parce qu’ils ne veulent pas déranger qui que ce soit (20%).

À noter que la Ville de Toronto peut offrir un service en français lorsqu’un appelant du 3-1-1 le demande, mais celui-ci s’apparente à une traduction offerte au même titre que d’autres langues, et non à une politique bilingue.