Propos de Bernard Trottier : l’ACFA « estomaquée »

Le président de l'ACFA, Jean Johnson. Archives

EDMONTON – Le député francophone Bernard Trottier fait bondir les Franco-Albertains. L’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) se déclare « estomaquée » des déclarations de l’élu conservateur, pourtant originaire de l’Alberta. 

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @SebPierroz

« La dualité linguistique du Canada est un fait accompli et tout le monde le sait », avait entre autres fait part l’élu d’Etobicoke-Lakeshore dans une entrevue à #ONfr, diffusée cette semaine. « Les droits linguistiques sont reconnus et on constate la forte demande pour l’éducation en français. »

Des propos difficiles à digérer pour l’ACFA, d’autant que M. Trottier, natif de Saint-Paul, en Alberta, a toujours grandi dans une famille francophone.

Joint par #ONfr, le président de l’ACFA, Jean Johnson, ne mâche pas ses mots : « Je ne l’ai jamais rencontré, mais ses propos sont complétement inconsistants. Il a la mémoire courte. »

Si les propos déçoivent, le responsable de l’organisme porte-parole des 80 000 Franco-Albertains se refuse à mettre tous les conservateurs dans le même sac. « Nous avons des champions parmi eux pour la cause francophone. Je pense par exemple à Rona Ambrose, la députée d’Edmonton-Spruce Grove ou encore Christian Paradis, l’élu de Mégantic-L’Érable. »

 

Non à Harper

Mais au-delà du cas de Bernard Trottier, un nom en particulier horripile le président de l’ACFA. Celui de Stephen Harper. « Il a généré dix ans de frustration pour les francophones de l’Alberta (…) Le gouvernement est microgéré (sic) par lui, il n’a confiance en personne. »

M. Johnson ne décolère toujours pas que le premier ministre « ait demandé au ministère de la Justice d’intervenir » dans la cause Caron. Un cas juridique dont le jugement de la Cour suprême du Canada se fait toujours attendre, et qui pourrait faire de l’Alberta une province bilingue.

Autre reproche : le manque de communications en français du gouvernement fédéral. « Ils contreviennent clairement à la Loi sur les langues officielles. Lorsque les organismes francophones et nous leur écrivons en français, ils nous répondent en anglais. »

Force est de constater que le franc-parler de M. Johnson détonne, là justement ses homologues provinciaux ménagent bien souvent la chèvre et le chou devant l’attente des subventions du gouvernement fédéral. « Le jour l’on se met à genoux devant Harper, on est mieux de rester chez nous et de nous assimiler », soutient le président.

Malgré cette critique acerbe contre le premier ministre, le responsable refuse de tresser des lauriers à MM. Trudeau et Mulcair. « Durant le débat de Radio-Canada, il n’y a pas eu une prise de position de leur part sur la francophonie hors Québec (…) Lorsque les libéraux étaient au pouvoir de 1993 à 2006, on a eu beaucoup de difficultés avec eux, bien qu’ils se vantent toujours d’être acquis à notre cause. »

 

Espoir provincial

Selon toute vraisemblance, les 34 circonscriptions de la province seront de nouveau balayées par une vague bleue, le 19 octobre. C’est pourtant le Nouveau Parti démocratique (NPD) qui, en mai dernier, avait déjoué les pronostics en remportant largement les élections provinciales. Une victoire qui continue d’entretenir l’espoir pour les Franco-Albertains.

« Beaucoup de députés provinciaux sont bilingues. C’est un atout pour nous. Il y a eu beaucoup de belles paroles de la part du nouveau gouvernement. »

Cette « cohabitation » politique assez unique pourrait même être un avantage, d’après M. Johnson. « Le gouvernement de Harper veut donner plus de responsabilités aux provinces. C’est presque une bonne nouvelle pour nous. »