NPD : des points à prendre sur les langues officielles

De gauche à droite, Charlie Angus, Guy Caron, Niki Ashton et Jagmeet Singh. Crédit image: Montage #ONfr

SASKATOON – La question linguistique n’occupe pas le devant de la scène lors de la course à la chefferie néo-démocrate. Pourtant, le Nouveau Parti démocratique (NPD) aurait une opportunité de s’y distinguer face au Parti libéral du Canada (PLC), estime le politologue Peter Graefe.

BENJAMIN VACHET
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Les candidats à la succession de Thomas Mulcair se retrouvent ce mardi 11 juillet, à Saskatoon, pour un cinquième débat. La campagne à la chefferie du NPD doit permettre de redonner de l’élan à l’ancienne opposition officielle. Pour se distinguer, le NPD pourrait miser sur la carte des langues officielles, juge M. Graefe, professeur à l’université McMaster.

« Pour l’emporter face aux libéraux, les néo-démocrates pourraient se positionner comme les véritables acteurs du changement en démontrant que Justin Trudeau n’a pas réussi à l’incarner. De ce point de vue, le NPD pourrait notamment profiter de la faiblesse du Parti libéral du Canada sur la question des langues officielles et du bilinguisme pour se distinguer. »

Le politologue rappelle toutefois que l’enjeu n’a pas été beaucoup discuté par les candidats à la chefferie néo-démocrate. Mais sur le terrain, le parti a réussi à se faire entendre par la voix du député de Drummond et critique aux langues officielles, François Choquette, qui a repris le flambeau d’Yvon Godin, en défendant le bilinguisme des juges à la Cour suprême du Canada ou quand est venu le temps de déposer des plaintes auprès du Commissariat aux langues officielles du Canada.

M. Choquette a profité de l’espace laissé libre, un temps, par le porte-parole conservateur en matière de langues officielles Bernard Généreux, plus à l’aise sur les questions économiques, avant que le Parti conservateur du Canada (PCC) ne le remplace par Sylvie Boucher, beaucoup plus expérimentée sur la question.

« Cet aspect demeure toutefois marginal pour les néo-démocrates qui avaient plus d’appétit là-dessus quand le Bloc Québécois était fort et qu’il fallait s’enraciner au Québec où le NPD comptait une grande partie de ses députés. La faiblesse actuelle du Bloc rend l’enjeu moins pressant. »

Une chose est sûre, la personne qui remplacera M. Mulcair sera capable de s’exprimer dans les deux langues officielles du Canada.

« Le NPD n’est plus à l’époque d’Audrey McLaughlin ou d’Alexa McDonough où il lui était difficile de trouver des candidats bilingues. Excepté Guy Caron, les trois autres candidats ne sont pas parfaitement bilingues, mais ce sera acceptable face à Andrew Scheer. »

Quatre candidats pour succéder à Mulcair

La course à la chefferie du NPD a vu un de ses prétendants jeter l’éponge, la semaine dernière. Le député de Colombie-Britannique, Peter Julian, a décidé de retirer sa candidature, faute de financement.

Désormais, les militants néo-démocrates ont le choix entre les Ontariens, Charlie Angus et Jagmeet Singh, le Québécois, Guy Caron et la Manitobaine, Niki Ashton.

« M. Angus a semblé bénéficié d’un élan en matière de financement au départ, mais il semble marquer le pas. M. Caron a les faveurs de plusieurs acteurs importants au sein du parti, alors que M. Singh s’est bâti une équipe forte, avec d’anciens collaborateurs de Jack Layton, et essaie d’élargir la base pour chercher de nouveaux membres. Quant à Mme Ashton, elle essaie de séduire la gauche du parti. »

Le député néo-démocrate ontarien, Jagmeet Singh. (Crédit photo : Archives, #ONfr)

Le député néo-démocrate ontarien, Jagmeet Singh a décidé de faire le grand saut en politique fédérale le 15 mai dernier. Face à trois députés fédéraux déjà en place, il pourrait incarner le changement. Mais ses positions sur l’implantation d’un cours d’éducation sexuelle en Ontario ou sur l’exemption du port du casque à moto pour les sikhs pourraient lui faire perdre des points au Québec, se sont inquiétés certains militants dans Le Devoir.

Nouveau chef au plus tard le 15 octobre

La course à la chefferie néo-démocrate ne soulève pour l’instant pas beaucoup d’enthousiasme, note M. Graefe.

« On s’est davantage intéressé à celle du Parti conservateur car c’est l’opposition officielle et que donc, le candidat choisi pourrait devenir le prochain premier ministre du Canada. Il y a eu aussi certaines positions controversées qui ont fait parler. »

Le politologue pense toutefois qu’il y aura davantage d’intérêt pour la seconde opposition une fois la succession de M. Mulcair désignée.

« Quand M. Mulcair avait été choisi, il n’y avait pas eu beaucoup plus d’enthousiasme. Pour beaucoup de Canadiens, une course à la chefferie est avant tout une question de gouvernance interne. »

Après le débat de Saskatoon de ce mardi, les quatre candidats auront encore trois débats pour convaincre les militants, puis une ultime occasion lors d’un événement organisé à la veille du début du scrutin, le 17 septembre, à Hamilton.

Les électeurs néo-démocrates auront ensuite deux semaines pour voter en ligne ou par courrier et les résultats du premier tour seront connus le 1er octobre, à Toronto. Si aucun candidat n’obtient plus de 50 % des votes, un deuxième tour aura lieu la semaine suivante, puis un troisième tour si nécessaire, de sorte que le prochain chef du NPD sera désigné au plus tard le dimanche 15 octobre, à Ottawa.

Selon M. Graefe, le temps presse pour le parti, même si ses chances de l’emporter en 2019 demeurent faibles.

« La longueur de cette campagne nuit au parti qui est quasiment absent des débats politiques canadiens depuis 18 mois. Dans l’esprit des Canadiens, le NPD est redevenu le « 3e parti ». »