« Nous sommes la seule université de langue française en Ontario »

Le recteur de l'UOF Pierre Ouellette.

HEARST – Une université par et pour les francophones dans le nord de l’Ontario. C’est le constat que se tue à répéter depuis quelque temps le recteur de l’Université de Hearst (UdeH), Pierre Ouellette, à l’heure où le débat sur le projet d’une université franco-ontarienne s’intensifie.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @SebPierroz

« Ça nous agace de voir que l’on oublie bien souvent de nous mentionner. Nous sommes la seule université de langue française en Ontario », explique M. Ouellette à #ONfr. Une parole que l’institution tente de répandre avec plus de force notamment sur les médias sociaux depuis plusieurs mois. 

Et les avis des spécialistes sont clairs : l’UdeH reste l’unique établissement du genre en Ontario, bien qu’un lien ténu le rattache toujours à l’Université Laurentienne.

L’établissement postsecondaire de 200 élèves et étalé sur trois campus (Hearst, Timmins et Kapuskasing) ne doit sa dépendance qu’au besoin de faire valider ses programmes par l’institution sudburoise. Concrètement, le logo de l’Université Laurentienne est dès lors mentionné sur le diplôme des finissants.

Mais à côté, l’institution publique de Hearst est gérée par son propre conseil des gouverneurs. Elle reçoit de plus du financement de la province au même titre que les autres universités de l’Ontario.

Si l’UdeH ne peut pas être considérée tout de même comme totalement indépendante au même titre que l’Université de Moncton, l’Université Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse ou encore l’Université de Saint-Boniface, un parallèle s’impose avec son homologue du Manitoba. « Elles ont un fonctionnement assez semblable », souligne l’historien Serge Dupuis. « Mais Saint-Boniface possède la capacité de demander une chartre, c’est-à-dire le document constitutif d’une université, ce qui n’est pas le cas de l’établissement de Hearst. »

M. Dupuis reconnait par ailleurs l’indépendance progressive de l’UdeH : « Il y a plus de 50 ans, l’établissement était un collège. Puis après une d’affiliation négociée en 1963, ses programmes et ses grades sont passés sous le contrôle de l’Université Laurentienne. Les programmes étaient alors bilingues, mais ils se sont francisés complètement au fil des années. »

Vocation dans le Nord

Des programmes de baccalauréat ès arts en gestion, histoire, psychologie et sociologies, et tout dernièrement des échanges tournés davantage vers l’international : cette large palette n’est pourtant pas un signe de devenir l’université franco-ontarienne.

« Nous n’avons aucune intention de l’être. Notre clientèle est avant tout pour les étudiants du Nord », rappelle M. Ouellette. Le recteur affirme par ailleurs avoir vu d’un œil favorable, il y a deux ans, la subvention de 14,5 millions $ du gouvernement libéral afin de bonifier l’offre de programmes postsecondaires en français dans la région de Toronto.

Une manière pour l’UdeH d’approuver partiellement le choix de Toronto comme cible prioritaire pour l’établissement d’une université franco-ontarienne comme l’a exigé le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) lors d’un point de presse à Queen’s Park, le mardi 10 février.

Car M. Ouellette a des réserves sur le projet : « Il pourrait y avoir une université de langue française à Toronto, mais elle ne serait pas pour autant l’Université de l’Ontario français. Elle ferait partie d’un réseau d’établissements, affiliés ou non, dont l’Université de Hearst fait déjà partie. Ça ne ferait pas plus de sens de dire que l’Université francophone de Toronto est l’Université de l’Ontario français que de prétendre que l’Université de Hearst l’est à l’heure actuelle. »

La vitalité de l’établissement de Hearst reste d’ailleurs un maillon important pour l’économie du nord de la province, si l’on en croit l’historien Gratien Allaire, ancien professeur justement à l’Université Laurentienne. « Sans cette institution, de nombreuses personnes auraient quitté leur région pour poursuivre des études universitaires, ce qui aurait appauvri la région. Après des études de premier cycle à Hearst, plusieurs ont ensuite poursuivi à la Laurentienne et à l’Université d’Ottawa pour obtenir un baccalauréat en pédagogie et retourner enseigner dans la région. »