L’Ontario de Kathleen Wynne

La première ministre de l'Ontario, Kathleen Wynne. Crédit photo: Archives, #ONfr

[ANALYSE]

Le gouvernement libéral à Queen’s Park a manqué une belle occasion de prendre le pouls des régions, cette semaine.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

La première ministre Kathleen Wynne a fait une tournée « de tout l’Ontario » pour vendre son plan économique à des dirigeants d’entreprises et municipaux. Elle s’est rendue à Brampton, Brantford, Burlington, Hamilton, Mississauga et Oakville. Et puis, un après-midi à Thunder Bay…

Pendant toute une semaine d’une tournée dite « provinciale », la chef libérale et députée de Toronto s’est éloignée seulement qu’une demi-journée à plus de 100 kilomètres de son bureau.

Aucun arrêt à Ottawa, où les autorités municipales attendent toujours un engagement clair de la province pour le financement de la deuxième phase d’un important projet de train léger. Aucun arrêt à Sudbury, où la communauté artistique francophone aimerait un signal d’encouragement pour le financement d’un projet de Place des arts. Aucun arrêt à Windsor, où l’économie demeure fragile.

Pourquoi pas Attawapiskat aussi?

Sans annoncer de grands investissements, Mme Wynne aurait quand même pu profiter de sa tournée pour se rendre dans les régions de la province qu’elle visite moins souvent, ne serait-ce que pour écouter les préoccupations de leurs habitants et leur dire qu’ils sont importants aux yeux de son gouvernement.

La première ministre a peut-être craint de s’attirer les foudres de l’Ontario rural à cause de l’inexorable hausse des tarifs d’électricité qui est plus lourdement ressentie à l’extérieur des grands centres. Soit. Mais elle ne traîne pas avec elle que des mauvaises nouvelles. Son gouvernement a récemment bonifié les enveloppes pour les routes provinciales et les routes de raccordement dans les régions rurales.

Besoins différents

L’Ontario est une grande province. Les besoins des habitants de Cornwall, Timmins et Sarnia sont à des lieues de ceux des habitants de Toronto, Mississauga et Hamilton. Les régions rurales n’ont certes pas le même poids démographique – et politique – que la grande région métropolitaine. Mais c’est une erreur de les ignorer.

Cette dernière tournée « de tout l’Ontario » de Mme Wynne s’est limitée presque exclusivement à des circonscriptions libérales dans la région Toronto. De quoi renforcer cette perception – déjà très forte dans certaines régions rurales – que la première ministre n’a d’yeux que pour la métropole et que les enjeux du reste de la province ne l’intéressent pas particulièrement.

Il est d’ailleurs étonnant que la chef libérale à Queen’s Park n’essaie pas davantage de marquer des points en-dehors des villes, où son parti est très peu présent. Tout ce terrain, elle le laisse en pâture aux progressistes-conservateurs et aux néo-démocrates.

Kathleen Wynne se dit peut-être que c’est mathématiquement possible de remporter des élections seulement avec le vote urbain. Mais c’est aussi démocratiquement malsain. Ce n’est pas un hasard si l’idée de faire du Nord ontarien une nouvelle province refait surface de temps en temps. Ça témoigne d’un sentiment d’aliénation.

Le centre-ville de Toronto n’est pas toujours le meilleur observatoire du panorama de l’Ontario.

Cette analyse est publiée également dans le quoditien LeDroit du 30 avril.