Le fédéral présentera son budget le 22 mars

OTTAWA – Le gouvernement de Justin Trudeau présentera son premier budget le 22 mars sur fond de perspectives économiques moribondes.  

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Trois mois après la présentation des dernières perspectives économiques et budgétaires, la situation du Canada ne s’améliore pas. À un mois du budget fédéral, qui sera présenté le mardi 22 mars, le gouvernement libéral devra faire face à un contexte économique très fragile.

Le ministère des finances a publié une mise à jour économique, lundi 22 février, dans laquelle il prévoit une croissance à la baisse. Le taux de croissance du Canada ne devrait être que de 1,4% en 2016, contre 2% prévu en novembre dernier. Combiné à la baisse du prix du baril de pétrole et à la situation économique des États-Unis et de la Chine, le gouvernement devrait connaître des déficits beaucoup plus important que prévus, selon les économistes. Le déficit devrait atteindre 18,4 milliards $ en 2016-2017, contre 3,9 milliards $ prévus il y a trois mois, puis de 15,5 milliards $ en 2017-2018, contre 2,4 milliards $ prévus à l’automne 2015.

Ces chiffres tiennent compte du plan libéral de baisse d’impôts pour les classes moyennes, mais pas des autres mesures qui seront annoncées dans leur budget.

De quoi diminuer les attentes, même si, en visite pour une consultation prébudgétaire à Ottawa, lundi 22 février, le ministre des Finances Bill Morneau a promis « de bonnes surprises à annoncer le 22 mars ».

S’il a reconnu que le retour à l’équilibre pourrait prendre plus de temps que prévu et ne s’est pas fixé d’échéance, M. Morneau a insisté sur la pertinence, en ces temps difficiles, d’investir pour stimuler l’économie, comme promis par le Parti libéral du Canada (PLC) durant la campagne. Il a par ailleurs exclu l’idée d’avoir recours à une hausse de la taxe sur les produits et services (TPS) pour financer les promesses libérales.

Une annonce qui a rapidement fait réagir la chef du Parti conservateur du Canada, Rona Ambrose, qui  n’a pas manqué de fustiger le gouvernement et le ministre des finances.

« Les Libéraux ont hérité d’un budget équilibré grâce à la bonne gestion économique des Conservateurs. Ils ont dépassé leur budget en moins de 100 jours, uniquement à cause de leurs nouvelles dépenses incontrôlées. Ils ne peuvent pas mettre leurs fausses promesses et leurs dépenses irréfléchies sur le dos du ralentissement économique ou d’une histoire inventée selon laquelle le budget n’était pas encore équilibré quand ils sont arrivés au pouvoir. Quand il s’agit de dépenser votre argent, les Libéraux sont incapables de se contrôler. Ces dépenses hors de contrôle sont imprudentes et irresponsables, et découlent entièrement de l’incapacité de prendre les décisions difficiles requises pour respecter l’argent des contribuables. En fait, ça remet en question la compétence de Bill Morneau comme ministre des Finances. »

La FCFA optimiste

Dans l’assistance, la professeure à l’Université d’Ottawa, spécialiste en gouvernance, Caroline Andrew, était venue écouter le ministre Morneau en tant que membre du Partenariat local pour l’immigration d’Ottawa (PLIO).

« M. Morneau est resté très vague dans ses promesses, car on voit que le gouvernement a encore des choix à faire. Pour notre part, nous espérons qu’il y aura des investissements pour l’immigration dans ce budget afin de donner aux organismes d’accueil les moyens d’assurer de bons services et de donner toutes leurs chances aux nouveaux arrivants. Le ministre Morneau a dit qu’il voulait investir et notamment pour les familles et les plus démunis, nous espérons que cela tiendra également compte des immigrants qui sont un atout important pour notre économie canadienne. »

Également présente lundi matin, la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, Sylviane Lanthier, ne voulait pas s’inquiéter outre mesure.

« Ce que je retiens, c’est que le ministre Morneau a insisté sur le fait que même si l’économie va mal, ce n’est pas pour autant que le gouvernement va oublier son plan d’investissements pour relancer l’économie et soutenir les familles et les plus démunis. J’espère qu’il y aura un plan pour nos communautés car en investissant dans la francophonie en milieu minoritaire, on contribue à soutenir notre identité canaienne. Nous attendons ce budget avec une grande impatience. »

Le gouvernement Wynne est confiant

L’impatience est la même du côté de Queen’s Park. Le gouvernement de l’Ontario, qui attend beaucoup en matière d’infrastructure, notamment, dit pour sa part ne pas trop s’inquiéter d’un déficit fédéral substantiellement plus élevé. Les libéraux provinciaux disent par ailleurs maintenir le cap sur l’élimination de leur déficit, de l’ordre de 7,5 milliards $, d’ici 2018.

« Je crois que le fédéral fait ce qu’il a à faire pour stimuler l’économie. C’est ce que l’Ontario fait aussi depuis quelques temps. Et nous voyons les bénéfices de nos investissements », a déclaré le grand argentier provincial Charles Sousa à sa sortie de la période de questions, le 22 février. « C’est encourageant d’avoir un partenaire fédéral avec lequel nous pouvons discuter. Le budget que je vais déposer jeudi sera le reflet de nos discussions et notre travail avec le fédéral. »

Le budget de l’Ontario sera déposé hâtivement, jeudi 25 février.

« Il y a une opportunité pour réinvestir dans l’économie verte et l’infrastructure verte », a soutenu à son tour la première ministre Kathleen Wynne devant la presse parlementaire, rappelant au passage l’engagement de son gouvernement à rénover le parc de logement abordable de la province pour qu’il respecte les plus hauts standards environnementaux.

À Toronto, le maire John Tory a fait part lui aussi de ses attentes en vue du budget provincial. Les transports régionaux, le logement abordable et la création d’emplois sont sur sa liste de demandes pour la métropole. « Le corridor de Kitchener-Waterloo à Toronto est essentiel à l’économie », a-t-il fait valoir lors d’un point de presse à Queen’s Park après une rencontre avec la première ministre.

Pressé de questions par les journalistes venus écouter son allocution au Centre communautaire Richelieu-Vanier, le ministre Morneau a quant à lui répété à plusieurs reprises que son gouvernement respectera son programme. Il s’est toutefois gardé d’assurer que toutes les promesses électorales du PLC pour l’année 2016 seront maintenues.

Réponse le 22 mars prochain.