Le Collège Glendon : après la désignation

Le collège universitaire Glendon de l'Université York, à Toronto. Courtoisie

TORONTO – Le Collège Glendon a officiellement obtenu sa désignation en vertu de la Loi sur les services en français (LSF), a annoncé le gouvernement de l’Ontario, mercredi 23 mars. Cette désignation protège les acquis, mais l’offre de cours en français doit encore être grandement bonifiée, s’entendent le principal de l’établissement et des représentants étudiants. La marche à suivre pour y arriver est cependant loin de faire consensus.

ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg

« D’abord et avant tout, c’est une question de reconnaissance de ce qu’on fait depuis 50 ans […] Il y a quelques petits changements. On va notamment former un comité francophone à l’échelle de l’université. Il est aussi requis que nous ayons deux gouverneurs francophones à l’Université York », explique Donald Ipperciel, principal du Collège universitaire Glendon de l’Université York. La désignation est un « point de départ », a-t-il confié en entrevue avec #ONfr.

La provost et vice-présidente académique de l’Université York, Rhonda Lenton, a indiqué, dans une déclaration, que la désignation constitue aussi une assurance quant au financement de l’offre francophone de Glendon.

« La désignation partielle assure la protection du  financement des programmes de langue française et confirme l’engagement de York, par le biais de Glendon, à développer ces programmes ».

Myriam Vigneault, co-présidente du Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), estime que la désignation ne doit cependant pas faire oublier les lacunes importantes en matière d’offre en français à Glendon.

« Actuellement, les programmes et les cours en français sont peu nombreux et la vie académique en français est limitée. C’est difficile pour nous de crier victoire », dit-elle.

Elle dénonce l’annulation de certains cours en français par Glendon ou encore le fait que certains cours obligatoires ne sont pas offerts à chaque année dans la langue de Molière.

Les représentants des étudiants disent qu’il faut augmenter l’offre de cours pour attirer plus d’étudiants francophones.

Le principal Ipperciel croit que la priorité est plutôt d’augmenter la population étudiante de langue française.

« On a le même objectif, mais pour moi, son atteinte passe par une augmentation du nombre d’étudiants francophones, d’abord », dit-il.

Son objectif? « Là, on est à seulement 16-17% de francophones. Si on en avait 50%, ça réglerait bien des problèmes. Cela permettrait de s’assurer qu’on aurait autant de cours en français qu’en anglais, qu’il s’agisse de ceux obligatoires ou de ceux optionnels », fait-il savoir.

Il reste que de nouveaux programmes ont pu voir le jour au cours des dernières années grâce à une enveloppe spéciale du gouvernement ontarien. Une enveloppe de 16,5 millions avait été débloquée pour bonifier l’offre en français dans le centre et le sud-ouest. Sa survie n’est pas assurée, révèle le principal Ipperciel.

« À Glendon, on a ouvert cinq nouveaux programmes. Pour les maintenir, il faut des fonds. Il n’y a pas de programmes francophones en milieu minoritaire qui ne sont pas subventionnés. Il faut du financement stable. C’est la prochaine étape, on va aller voir les gens du gouvernement », fait-il savoir.

L’université franco-ontarienne réclamée, désignation ou pas

La désignation de Glendon ne vient en aucun cas diminuer l’ardeur des étudiants du collège universitaire en faveur d’une université franco-ontarienne.

« On parle ici de la désignation partielle d’un campus bilingue d’une université anglophone. C’est un pas positif, mais ça ne répond pas aux besoins des étudiants, ça ne règle pas les problèmes », tranche Myriam Vigneault.

Selon elle, il faut plus que jamais permettre aux francophones de gérer eux-mêmes leur destinée en matière d’éducation post-secondaire.

Éric Desrochers, activiste étudiant en faveur de la création d’une université franco-ontarienne, tente depuis plusieurs années de faire pression sur l’Université York pour augmenter la place du français à Glendon.

« L’offre de programmes et de cours à Glendon est inadéquate et ça fait quatre ans que je le dis et que je l’entends. […] Je ne peux pas dire que j’ai vu de grandes améliorations quant à la situation du français à Glendon. J’ai plutôt l’impression que ça a stagné », souligne-t-il.

La désignation ne doit pas porter ombrage au projet d’université franco-ontarienne, dit Éric Desrochers.

« Cette démarche s’inscrit dans une longue liste de tentatives de la part des institutions bilingues afin de faire mourir le projet pour une université par et pour les francophones. Si proches du but, on n’arrêtera pas de militer tout simplement parce que Glendon nous garantit des miettes. On va continuer à se battre pour notre université, puis on l’aura », ajoute l’étudiant qui terminera prochainement ses études de baccalauréat.

L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario a réagi à l’annonce de la désignation en rappelant, elle aussi, l’importance d’un établissement franco-ontarien.

« Au-delà des désignations existantes pour les universités, nous souhaitons quand même réaffirmer une des conclusions des États généraux sur le postsecondaire, à savoir, une gouvernance par et pour les francophones en matière d’éducation universitaire. », a indiqué son président, Denis Vaillancourt.

Le principal de Glendon est opposé à l’idée d’un tel projet.

« Je crois que ça coûterait cher pour peu de résultats, mais si une université franco-ontarienne voyait le jour, ça serait un autre allié pour nous », dit-il néanmoins.

Il considère cependant que son campus a tout pour devenir l’un des cœurs de la francophonie torontoise.

« Je n’ai pas de problème à ce que Glendon soit le hub francophone et bilingue. Si on pouvait avoir d’autres institutions qui se joindraient à nous dans des partenariats, ça serait une belle affaire », laisse-t-il tomber.