La Loi 41 continue d’inquiéter

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TORONTO – Plus d’un mois après son adoption par le parlement ontarien, la Loi 41 sur les services en santé continue d’inquiéter les professionnels du milieu. Certains craignent que trop de pouvoirs soient désormais concentrés entre les mains du ministre de la Santé, Dr Eric Hoskins.

JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE 
jmorissette@tfo.org@JFMorissette72

L’association Concerned Ontario Doctors part en croisade contre la Loi 41, un mois après son adoption. Depuis plusieurs jours, le groupe multiplie les offensives dans les médias sociaux pour exprimer son mécontentement.

L’organisme, qui regroupe une centaine de professionnels de la santé de la province, dénonce vivement l’augmentation de la bureaucratie dans le système de santé et les pouvoirs augmentés des Réseaux locaux d’intégration des services de santé (RLISS) qui ont été inclus dans la nouvelle législature.

Le groupe de professionnels de la santé dénonce également que plus de pouvoirs soient octroyés au ministre Hoskins et le contrôle qu’il pourra exercer sur l’ensemble du système de santé ontarien dans le but de rationaliser les ressources.

Selon le Dr Kulvinder Gill, président de l’association de médecins, le plus inquiétant dans la nouvelle loi est le manque d’assurance quant à la confidentialité des dossiers médicaux à cause de la bureaucratie.


« Aucun bureaucrate ne devrait avoir accès aux données personnelles des patients et aux détails les plus privés » – Dr Kulvinder Gill


Le Dr Gill croit que le gouvernement devrait tout simplement retourner à la table à dessin plutôt que d’aller de l’avant avec l’implantation des mesures de la Loi 41.

« Aucun professionnel de la santé que ce soient des médecins, infirmières ou physiciens n’appuient la Loi 41. Elle devrait être révoquée », dit-il.

Le ministre de la Santé, Dr Éric Hoskins, s’est défendu de l’inquiétude soulevée par les médecins. Dans une déclaration écrite transmise à #ONfr, le ministre a affirmé que toutes les mesures sont déjà en place pour assurer la vie privée des patients et la confidentialité des dossiers médicaux.

« Toutes les mesures législatives concernant la vie privée restent en place et continueront de couvrir le contenu des dossiers médicaux des patients. Avec le passage de la Loi sur la protection des renseignements personnels sur la santé il y a quelques mois, les informations médicales n’ont jamais été aussi protégées. Cela inclut les employés du gouvernement et le personnel médical non autorisé. La Loi 41 va même plus loin et assure que les patients gardent un contrôle strict de leurs informations médiales », a-t-il expliqué par courriel.

Eric Hoskins

Le ministre Hoskins a ajouté que la Loi 41 n’allait pas augmenter les niveaux de bureaucratie dans le système de santé ontarien. Il croit plutôt que les changements vont permettre d’économiser de l’argent.

« Les changements vont plutôt permettre d’injecter plus de fonds pour les patients et non le contraire », a-t-il expliqué. « En éliminant une couche administrative supplémentaire, en ajoutant des responsabilités aux RLISS, nous serons en mesure d’économiser des millions de dollars qui pourront être réinvestis directement pour les patients. »

Le ministre de la Santé conclut que la Loi 41 donnera plus de pouvoir aux groupes de médecines familiales en établissant des comités aviseurs pour permettre une meilleure communication avec les professionnels du milieu.

Depuis des semaines, le torchon brûle entre le ministre Hoskins et les médecins de la province. Récemment, la province a fait une offre de travail à l’Association médicale de l’Ontario (AMO), sans entente depuis près de quatre ans. Le gouvernement a, entre autres, proposé une entente salariale de trois ans et des augmentations de salaire de 185 millions de dollars.

Toutefois, l’offre a rapidement été rejetée par l’AMO, qui n’avait pas mâché ses mots envers le ministre Hoskins en lui reprochant d’avoir présenté l’offre publiquement avant que les membres aient la chance de s’exprimer. Plusieurs médecins avaient alors réclamé la démission du ministre de la Santé de l’Ontario.

Les partis d’opposition contre la Loi 41

Le Parti progressiste-conservateur de l’Ontario (PC de l’Ontario) et le Nouveau Parti démocratique de l’Ontario (NPD de l’Ontario) s’étaient également opposés à la Loi 41 au cours des dernières semaines.

La député du NPD de l’Ontario et porte-parole pour les Affaires francophones, France Gélinas, avait en effet proposé plusieurs amendements au projet de loi lors des présentations en comité consultatif, mais rien n’avait été retenu par le gouvernement. Elle déplorait entre autres qu’aucune protection n’ait pas été ajoutée pour les francophones dans la loi et que seule une poignée de mentions de la langue de Molière ait été ajoutée dans le texte final adopté par Queen’s Park.

« Les libéraux ont tous voté contre en me répondant que le système actuel fonctionnait bien ou que si l’on faisait des changements pour les francophones, il faudrait le faire pour tous les autres groupes linguistiques en Ontario. Il n’aurait pas plus me répondre quelque chose de plus enrageant », s’était-elle insurgée au micro de #ONfr.

La députée néo-démocrate, France Gélinas, a livré un discours très politique, le samedi 29 octobre, à Sudbury, lors du rassemblement de l'AFO.

En tout, la coalition Concerned Ontario Doctors avance que près de 100 amendements ont été avancés par les partis d’opposition et que tous ont été refusés par les libéraux.