Justice en français : exporter les initiatives au-delà d’Ottawa

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OTTAWA – Mieux informer les justiciables francophones dans leur langue : l’expérience lancée à Ottawa il y a un an pourrait être poursuivie ailleurs dans la province.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

Vendredi 22 avril, quelque 80 Franco-Ontariens étaient réunis pour une vaste consultation au centre Pauline-Charron d’Ottawa. Le temps de parler des bons et mauvais coups du projet pilote commencé au palais de justice en mai 2015, mais surtout de penser à l’avenir.

Car le temps presse pour les justiciables francophones qui n’ont pas toujours le réflexe de demander le service en français lorsqu’ils entrent dans un palais de justice ou bien lorsqu’ils sont confrontés à un problème de justice civile. La province bénéficie pourtant d’un régime de bilinguisme officiel dans le domaine de la justice depuis 1984.

« On veut effectivement élargir ce projet dans la province, mais pas dans le même temps. On veut que ce soit un succès », a assuré la ministre déléguée aux Affaires francophones et Procureure générale de l’Ontario, Madeleine Meilleur, au micro d’ONfr. « Des régions comme le Nord-Est de l’Ontario sont ciblées par le projet pilote. »

Animateur de la consultation, l’avocat Ronald Caza reconnait le défi du nord-ontarien : « Ces populations sont plus vulnérables, et donc plus hésitantes à demander des services en français (…) Il faut que les francophones demandent les services en français! »

Désormais, le palais de justice d’Ottawa possède plus de représentants des services au comptoir désignés pour livrer des services en français. Le client est aussi automatiquement dirigé vers l’un des représentants capables de d’exprimer dans la langue de Molière. Un bilan que tous décrivent comme « positif ».

En dehors de la capitale du Canada, les lacunes persistent : « Il y a des greffiers et des moniteurs bilingues mais on ne leur offre du travail qu’à temps partiel », a souligné la juge Johanne Lafrance-Cardinal lors de l’événement.

Le cas des régions non désignées

Dans les zones non protégées par la Loi sur les services en français, les manques sont aussi criants : absence de juges et de greffiers bilingues, en encore une obligation d’accepter l’anglais pour éviter des frais additionnels, du fait essentiellement que ces régions, totalisant plus de 100000 Franco-Ontariens, n’ont pas l’obligation de donner le service dans la langue de Molière.

Ces exemples avaient déjà mis en exergue dans le rapport Rouleau/Le Vay en 2012, et intitulé Accès à la justice en français, et repris par le commissaire aux services en français de l’Ontario, François Boileau.

« J’aimerais que les éléments positifs du projet pilote à Ottawa  puissent directement être connus dans ces régions non désignées », a illustré Denis Vaillancourt, à #ONfr.

« Dans les régions non désignées, si nous avons le personnel présent, on va pouvoir développer de meilleurs pratiques », a fait quant à elle valoir Mme Meilleur, à notre micro.

En janvier dernier, Me Boileau s’était pourtant fendu d’un communiqué pour dénoncer le système des bénévoles mis en place dans les régions non désignées. Grosso modo, l’initiative du gouvernement de recruter des bénévoles du personnel bilingue pour donner un coup de pouce à ces tribunaux n’avait pas convaincu le chien de garde en matière des droits francophones.

Lancé sur le sujet par #ONfr, la Procureure générale s’est fait brève : « Bien écoutez, je laisse ça aux professionnels en place pour s’assurer que les données sont crédibles. »