Élection indécise à la FCFA sur fond de divisions

(Les membres de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada sont appelés à élire leur président, le 10 juin. Crédit image: Archives #ONfr)
Les membres de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada sont appelés à élire leur président, le 10 juin. Crédit image: Archives #ONfr

OTTAWA – L’élection à la présidence de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada se déroulera le 10 juin sur fond de divisions après le feuilleton de la nomination de Madeleine Meilleur. Interrogés par #ONfr, les organismes porte-paroles de la francophonie canadienne hésitent entre deux candidats aux approches différentes.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Sylviane Lanthier ou Jean Johnson? Les organismes porte-parole de la francophonie des provinces et territoires sont rares à avoir déjà fait leur choix.

Seules l’Association des francophones du Yukon (AFY) et l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) ont déjà tranché.

À Whitehorse, la présidente Angélique Bernard dit opter pour la continuité qu’incarne la présidente sortante de la FCFA, Sylviane Lanthier.

« Nous avons besoin de constance, notamment avec la nomination d’un nouveau directeur général. J’apprécie son expérience d’ancienne journaliste, la manière claire dont elle présente les dossiers. Elle est capable de mettre de côté ses réflexions personnelles pour laisser les membres se positionner, même s’il est bien sûr toujours difficile de plaire à tout le monde dans un si grand réseau. »

Plus au sud, le président par intérim de l’ACFA, Albert Nolette, privilégie son ancien président, Jean Johnson.

« Nous ne voterons pas contre Mme Lanthier, mais plutôt pour M. Johnson selon son expérience en Alberta où il a été très présent auprès des élus et où il a fait avancer les dossiers. La FCFA pourrait être plus visible sur la colline parlementaire et s’affirmer davantage sur certains dossiers, car cela nuit à sa capacité de faire connaître les besoins de la communauté. »

La présidente de la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB), Padminee Chundunsing, indique qu’elle jugera les deux candidats sur leur programme, quand son homologue de la Société franco-manitobaine (SFM), Jacqueline Blay, estime que Mme Lanthier s’en est bien sortie au cours de ces deux dernières années, dans un contexte difficile avec l’arrivée d’un nouveau parti au gouvernement.

« Ça demande du temps de prendre ses marques politiquement, mais elle a réussi à sensibiliser les élus et à faire l’entendre la voix de la FCFA. »

Mais pour le président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), Carol Jolin, il faudra faire plus dans les prochains deux ans.

« La présence doit être accrue au niveau fédéral où plusieurs dossiers importants vont se décider. Les attentes sont très élevées. »

 

Deux candidats, deux approches

La présidente de la Fédération des francophones de Terre-Neuve et du Labrador (FFTNL), Cyrilda Poirier, se dit inquiète.

« On a le choix entre le statu quo et un changement radical, avec en plus une nouvelle direction générale. Cette situation m’inquiète, d’autant que je sens de l’insatisfaction envers la FCFA de la part de certains organismes. Peut-être que nous n’avons pas toujours les discussions franches qui s’imposent? »

Pour la présidente de l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF), Françoise Sigur-Cloutier, le choix sera difficile.

« Ce sont deux candidats avec des approches et des personnalités très différentes. »

(La présidente sortante Sylviane Lanthier (à gauche) sera opposée à Jean Johnson (à droite). Montage #ONfr_
La présidente sortante Sylviane Lanthier (à gauche) sera opposée à Jean Johnson (à droite). Montage #ONfr

Le départ de l’ancienne directrice générale, Suzanne Bossé, à l’automne dernier et son remplacement par Alain Dupuis, l’ancien directeur général du Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), pourraient peser dans le choix de certains membres de la FCFA, soucieux d’assurer une certaine stabilité, pensent plusieurs organismes.

« Deux ans, c’est un mandat très court pour une présidence, mais ça donne aussi l’occasion de renouveler sa confiance si on est satisfait. Nous avons deux bons candidats qui doivent être remerciés pour leur investissement », juge Marie-Claude Rioux, directrice générale de la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse (FANÉ).

 

Le dossier Madeleine Meilleur divise

Selon plusieurs organismes interrogés par #ONfr avant le retrait de la candidature de Madeleine Meilleur pour le poste de commissaire aux langues officielles du Canada, la controverse qui a entouré cette nomination pourrait avoir un impact sur le résultat des élections à la présidence de la FCFA.

Les organismes francophones se sont montrés divisés avec d’un côté, ceux qui comme la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB) ou l’ACFA demandaient au gouvernement de reculer, et d’un autre, des organismes comme l’AFO qui s’accommodaient de la situation.

« Il y a eu un manque de leadership de la FCFA sur cette question, comme sur d’autres. Pendant une telle crise, il aurait fallu avoir une position plus claire et aller au front. Je veux quelqu’un à la présidence qui soit ferme sur les principes et ne fasse pas passer la stratégie politique au premier plan », estime le président de la SANB, Kevin Arseneau.

Malgré des divisions jugées « normales » par tous les intervenants, Mme Chundunsing insiste sur l’importance de travailler tous ensemble.

« On doit montrer une unité au gouvernement si on veut être crédible. »

Et pour y parvenir, le rôle de la présidence est primordial, explique la présidente de la Fédération Franco-Ténoise (FFT), Rachelle Francoeur.

« La présidence doit assurer une cohésion entre les organismes francophones. »

Peut-être signe des temps difficiles que traverse la FCFA, la Société Saint-Thomas-d’Aquin (SSTA) a refusé de se prononcer sur les élections de la FCFA auprès de #ONfr.

 

Quelles priorités pour la FCFA?

Démarchage des élus et visibilité publique font partie des priorités qui reviennent de la part des organismes interrogés par #ONfr.

« Nous ne sommes pas mieux servis par le gouvernement actuel que nous ne l’étions par le précédent. Le fédéral ne semble pas comprendre notre situation et son engagement n’est actuellement pas là où nous le souhaiterions », explique Mme Sigur-Cloutier qui reconnaît qu’il n’est « pas toujours simple d’influencer le gouvernement ».

La présidente de la FFTNL suggère de remettre en place les délégations de la FCFA sur la colline parlementaire pour rencontrer les députés et les sénateurs et se faire mieux connaître.

L’AFY milite également pour que la FCFA fasse la tournée de toutes les communautés. Car celles-ci peuvent être bien différentes d’un endroit à l’autre, souligne la présidente de l’Association des francophones du Nunavut (AFN), Mylène Chartrand.

« Ce qui est important pour nous, c’est d’avoir à la présidence quelqu’un qui connaît notre situation et notre contexte différent. »

Les organismes surveillent aussi de très près le dévoilement du nouveau plan d’action sur les langues officielles 2018-2023 et le dossier décisif de l’immigration francophone à l’extérieur du Québec.