Église de Fournier : un exemple de menace qui se banalise en Ontario français

Les églises francophones restent menacées de fermeture, voire de démolition.

FOURNIER – L’avenir de l’église St-Bernard de Fournier reste nébuleux. Menacée de fermeture par l’Archidiocèse d’Ottawa, la bâtisse religieuse de l’Est ontarien serait un cas symptomatique du patrimoine religieux franco-ontarien.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @sebpierroz

C’est en tout cas l’avis de l’archiviste en chef de l’Université d’Ottawa, Michel Prévost. « Le phénomène de fermeture des églises va s’accentuer. Ce n’est qu’un début et une question d’années. »

Baisse de la pratique religieuse, difficultés d’entretenir des lieux de cultes, ces défis concernent aussi les églises anglophones. À la différence que les églises francophones sont souvent plus « monumentales » selon M. Prévost, ce qui ajoute un défi supplémentaire pour conserver le lieu.

« Le phénomène n’est pas nouveau, et prend ses racines dès les années 60, avec la baisse de la fréquentation des églises », renchérit Marc-André Gagnon, historien à l’Université de Guelph. « Dans les années 2000, il y a eu déjà le mouvement SOS–Églises qui tentait de sauver des lieux de culte francophones dans le sud-ouest de l’Ontario. »

Reste que les exemples ne manquent ces dernières années pour illustrer cette fragilité. En 2013, l’église Saint-Charles-Borromée, dans le secteur Vanier à Ottawa, obtenait une protection in-extremis en vertu de la Loi ontarienne du patrimoine.

À Sturgeon Falls, l’église Sacré-Cœur n’a pas reçu cette désignation, plaçant les lieux de cultes à l’abri d’une destruction. Devant la somme considérable nécessaire pour les travaux, la bâtisse avait subi le pic des démolisseurs en 2015.

« Les communautés les plus petites sont souvent plus vulnérables », poursuit M. Prévost. « Dans les milieux urbains, c’est beaucoup plus facile de trouver une seconde vocation à l’église, lorsqu’elle doit fermer. »

Pour éviter que les fermetures ne se transforment en destruction, la solution pourrait ressembler au modèle québécois : la création d’un Conseil du patrimoine religieux capable de subvenir aux besoins du Clergé et des communautés locales pour financer les édifices.

Pour M. Prévost, des millions de dollars investis dans cette organisation auraient permis la sauvegarde de nombreux monuments au Québec. Dans le cas de l’Ontario, la mise en place d’une telle entité reste toujours au point mort.

Demande de désignation contestée

Dans le cas de l’église St-Bernard de Fournier, la décision de l’archevêque Mgr Terrence Prendergast de fermer l’église a déclenché la mobilisation des paroissiens, mais aussi de la municipalité de la Nation.

Crédit image : Archidiocèse d’Ottawa.

La semaine dernière, les élus ont adopté une résolution afin que l’église soit désignée en vertu de la Loi ontarienne du patrimoine. « Le processus est entamé. On est favorable à la demande », confirme le maire François St-Amour à #ONfr. « Mais l’archidiocèse a une objection. »

Au moment de mettre ces informations sous presse, l’archidiocèse d’Ottawa n’avait pas retourné nos demandes d’entrevue. Mais il s’avère que le diocèse voit bel et bien d’un mauvais œil une désignation.

Dans le même temps, la reconstruction de l’église de Saint-Isidore, détruite par un incendie en juillet 2016 et située à quelques kilomètres, est vue par beaucoup comme un prétexte à cette fermeture.

« Ça serait une victoire de garder notre bâtiment », explique à #ONfr, Murielle Bourgon, une résidente de Fournier impliqué dans le dossier de la sauvegarde de l’église.